La belle langue que la nôtre, hé, hein, quand on y pense ? Dans quel autre patois azimut côtoie-t-il azur et azalée, je vous le demande ? Avis d’imposition aussi, moui, et son lot d’auto-apatrides.
Plutôt que de les plaindre, revenons plutôt à nos moutons, moutons.
C’est qu’à force d’employer tous azimuts l’expression « tous azimuts » (« dans tous les sens », d’où le plaisant azimuté signifiant littéralement déboussolé, z’allez voir pourquoi), on a failli oublier le sens de ce petit mot ô combien sympathique.
En astronomie, grande pourvoyeuse de vocables évocateurs (zénith, supernovæ, neutrinos, bonsoirrr Claude Sérrrillon…), l’azimut désigne
l’angle formé par le plan vertical d’un astre et le plan méridien du point d’observation.
Avouez que vous n’y bitez guère plus que bibi. Pour faire simple, pointez-vous dans un champ, regardez l’horizon pile au nord, faites un quart de tour sur vous-même en récitant « une poule sur un mur », à ce moment-là, levez les yeux vers la voûte céleste et bing ! une étoile droit devant. Si vous tracez une ligne imaginaire de l’astre vers le champ, vous obtenez un point sur l’horizon, éloigné du nord de tout à l’heure de 90°. Ça va jusque-là ? Pas de questions ? Evidemment, les anciens n’avaient que ça à foutre et le coup de la comptine, c’était juste pour corser un chouïa.
Chez les géographes, c’est autrement plus fastoche. Il y a l’azimut géodésique :
angle dièdre formé par les demi-plans limités par la normale à l’ellipsoïde passant par le point de station et contenant respectivement la direction considérée et l’axe de révolution de l’ellipsoïde,
à ne pas confondre bien sûr avec l’azimut magnétique :
angle dièdre formé par les demi-plans limités par la verticale du lieu et contenant respectivement la direction considérée et celle du nord magnétique.
L’on ne vous fera pas l’affront d’expliquer, c’est pareil qu’au-dessus à une vache près.
Comme d’hab, c’est en scrutant l’étymo que tout s’éclaire.
Passé par l’espagnol acimut, notre azimut chéri vient de l’arabe sumût, pluriel de « as (al) samt », « le chemin ». Si d’aventure vous le croisez écrit à l’ancienne (azimuth), ça vous rappellera ce bon vieux zénith et pour cause, c’est le même mot (élagage de « samt ra’s », « le chemin au-dessus de la tête ») !
De « chemin » à « direction », y’avait pas loin : nous devons l’expression « tous azimuts » aux techniques martiales. Dans ses mémoires, De Gaulle évoque des « pièces tous-azimuts » capables de tirer dans toutes les directions.
Vous vous sentez tout azimuté après ça ? Zen, restons zen, comme disait Zazie (mute).
Merci de votre attention.