Ceux qui boulottent encore leurs crottes de nez l’ignorent mais jusqu’à une époque récente, le mot stress n’était jamais prononcé. Vivions-nous plus relax alors ? Déjà oui ; pour s’en convaincre, il suffit de comparer le rythme d’une archive INA à une émission au pif du PAF actuel. Les motifs d’énervement se comptaient-ils sur les doigts de la main ? Bé non, on somatisait tout pareil mais le diagnostic allait d’une « tension nerveuse » à un « surmenage » des plus précis. Tandis que de nos jours, les petits khôns en goguette bavent à tout propos :
Vas-y, ça m’stresse, là
et, à la même fréquence,
Vas-y, ça m’soûle, là
quoique parfaitement sobres. A d’autres, hein.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Stress n’est attesté qu’en 1950 en Gaule mais les Grands-Bretons l’emploient allègrement depuis le XIVe siècle au sens d’« épreuve, affliction » puis de « contrainte, effort, tension ». Very well, me direz-vous. Sauf que le mot dériverait du vieux français « destrece » ou « destresse », aïeul de notre détresse et de l’anglais distress (sens proche d’« affliction »).
Seule une feuille de papier à cibiche sépare cette origine de l’anglo-normand « estresce » ou « estrece ». C’est moi ou étroit saute aux yeux ? A étroitesse, avouez qu’on a vite fait d’associer oppression. Y’a qu’à voir dans quel état nous quittons une cabine d’essayage, toute claustrophobie mise à part.
Le latin strictus (« serré », d’où « strict » !), participé passé du verbe stringere (« é-treindre », « re-streindre » !!) plaide pour l’antériorité d’« estrece » sur « destrece ». Logique ! On peut vous dénouer par d’affectueux « déstresse »…
Notons enfin que déstresser, pas plus que stresser ou stressant, ne trouvent d’équivalent dans la langue de Shakespeare, plutôt friande de l’expression figée « to put the stress on » : « mettre l’accent, insister sur, souligner » d’une pression forte un élément important.
Voilà un élément à souligner d’une pression forte, sur lequel il me semblait important de mettre l’accent, d’insister.
Merci de votre attention.