A l’instar de « vite, un café » et de « faut que j’aille chier », pas un jour sans qu’allo ne s’échappe machinalement de notre clapet. Et pas que le nôtre : les Brésiliens disent alô, les Vietnamiens a-lô, les Hongrois hallod, les Espagnols ola. Font bande à part notamment les Italiens (pronto), les Japonais (moshi moshi), les Chinois (wei), les mal léchés (ouèye ?) et les Allemands (bitte : « s’il-vous-plaît », « je vous en prie », « nous afons les moyens te fous faire barler »).
Ce « Y’a quelqu’un ? » perfectionné indique que y’a quelqu’un au bout du fil, qui vous invite à vous identifier. Surtout s’il ne vous entend pas, auquel cas suivront d’autres allo ? suppliants, parfaitement audibles de votre côté.
Grand moment de solitude entre tous.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Pourquoi ces quatre lettres ? Parce qu’il fallait bien dire quelque chose, té ! Et d’ailleurs, on n’a point évoqué les Anglo-saxons, à qui l’on doit ce « hello/hullo » transformé pour les besoins de la cause. Il semble que Thomas Edison le premier (et non l’inventeur officiel du bigophone Alexander Graham Bell, qui voulait proposer « ahoy ») ait adressé ce « bonjour » poli à son interlocuteur.
Hello lui-même, attesté en 1883 aux Etats-Unis (version en u pour les Anglais), provient de « hallo », dérivé de « holla » ou « hollo », « halte ». Retour à l’envoyeur, c’est chez nous que l’interjection prit corps vers 1350, jusqu’à bourgeonner en locution dans le fameux « mettre le holà » ! Proche du hail angliche et d’un heil de sinistre mémoire, le cri sert depuis le XVe siècle aux marins à se… héler d’un esquif à l’autre. Distance qu’on retrouve logiquement, démultipliée, entre deux allo.
Holà non ! On ne s’étendra pas sur le « bourdonnement » du moment :
Non mais allo, quoi !
ni sur son auteure présumée.
Pour le plastique, compter 450 ans avant que la nature en vienne à bout, 6 mois avant oubli total.
Merci de votre attention.