Quand on n’est point occupé à se mirer sous toutes les coutures, nous nous demandons avec angoisse comment les autres nous trouvent. Pour varier les plaisirs, on a donc installé une glace sans tain, appelée cote de popularité, entre les personnages publics et nous. Les sondageux, relayés par les journaliers (ou l’inverse), seraient si tristes si on leur confisquait. Oh le gros chagrin.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Comme l’instrument n’a qu’un trou, l’aversion ou la sympathie qui s’en échappent sont assez brutes de décoffrage :
Avez-vous une bonne opinion d’untel ?
Au point qu’assister à un record d’impopularité est devenu un motif de délectation à part entière :
L’action du gouvernement n’est plus soutenue que par 22% des Français.
Au passage, puisque vous non plus ne vous souvenez pas avoir été consultés sur la question, il doit plutôt s’agir de 22% du millier de péquins qu’on a emmerdés sondés à l’autre bout du fil. Mais nous y reviendrons car c’est un gros morceau – sans doute le plus monumental morceau de moutonnerie ici-bas, mes moutons (de suite après les anges et les démons).
Et puis, hein, popularité, ça devient vague comme notion. Robert est catégorique :
Fait d’être connu et aimé du plus grand nombre.
D’ailleurs, pour remettre les pendules à l’heure, il conseille d’aller voir à célébrité, gloire et renommée. Z’avouerez qu’accolée à sa cote, popularité snobe l’aspect « notoriété » en bloc.
Chez les politiques, si un autre Robert, Badinter celui-là, avait dû attendre qu’une cote de popularité légitime ses vues, la guillotine couperait encore des gars en deux à l’heure qu’il est. On connaît même des chanceliers qui ont fait fureur et dont la popularité nous a valu quelques déboires (« autogaffer », dit-on dans ces cas-là).
Course à l’audimat, pouces levés comptabilisés par un rézosocio dont le nom et l’intérêt m’échappent… de la petite bibine comparée à la cote de popularité que les médias appliquent matin, midi et soir aux élus du peuple.
Auxquels ils reprochent, dans leur incurable schizophrénie, sinon leur populisme, du moins de vouloir plaire.
Merci de votre attention.