Energumène

 

Trop beaux pour être vrais, certains mots paraissent sortis de nulle part. Energumène en faisait partie jusqu’à la phrase qui précède puisqu’on s’y attaque séance tenante. On peut dire que vous êtes vernis.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Vous conviendrez qu’un énergumène digne de ce nom jure toujours dans le paysage. Son apparition jette le trouble. A peine le remarque-t-on qu’on s’en méfie. C’est vrai, d’où déboule-t-il à la fin ?

Comme on s’épuise à le souligner , pis encore , z’aurez beau faire, les taches de religion incrustées dans la langue restent quoi qu’il arrive. Energumène ne déroge pas à la règle, qui au sens premier (1579) est « possédé par le diable ».
Diable.
Il faut attendre le sens figuré (1734) pour voir taxé d’énergumène celui « qui s’emporte violemment ». Et, plus près de nous, n’importe quel « individu au comportement exalté ou inquiétant ».

La faute au latin energumenos et au grec energoúmenon avant lui : « possédé par le démon ». Pt-pt-pt, ça se confirme.

Tordant : en première partie, on distingue nettement le grec energéô (« je travaille en dedans avec force ») qui devrait vaguement vous rappeler quelque chose un peu d’énergie non mais qui m’a foutu des ramollos pareils.
En mettant de côté la particule en-, on se retrouve en plein « travail » (ergon). Sans trop nous casser la nénette, nous avons formé là-dessus ergonomie (« étude des conditions de travail »).

Qu’il le veuille ou non, l’énergumène est donc travaillé par le daimon, cette « puissance divine » sachant tout de tout, dont on notera pour la petite histoire qu’aux yeux des Grecs, c’était pas le mauvais bougre.

 

Soulignons enfin la sonorité si particulière d’énergumène, qui n’évoque rien de connu sinon Léguman, ce héros animé lui aussi d’une force étrange dont les amateurs de Téléchat se souviennent encore avec frissons.

 

On gratterait volontiers à la porte d’hurluberlu et d’escogriffe mais si c’est pour déterrer une nouvelle soutane alors non alors.

Merci de votre attention.

 

2 réflexions sur “Energumène

  1. c’est donc l’énergumène qui a déteint (si je puis me permettre) sur le bougre qui avait le sens, fut un temps, de sodomite ?

    • Je ne m’étais pas arrêté sur le bougre (si je puis me permettre) mais en effet… Encore un cas d’hérésie, venu du latin pop. bulgarus (« bulgare », considéré comme hérétique…)

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