Ce rythme entêtant, ce billard vocalique, ces quatre syllabes sur lesquelles on bute comme autant de murs obstinés : admirons aujourd’hui récalcitrant, illustration en mot du théorème selon lequel « les objets sont nos ennemis ».
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Déjà, tout est dans le préfixe. Ce vieux ré-. On le retrouve à l’orée de rétif, regimber, refuser, réfractaire, rechigner, rebiquer, se rebeller, se rebiffer, bref, tout ce qui nous résiste mais pas pour longtemps putain de vérole de va chier de bordel de cul.
En parlant de « regimber », récalcitrant se dit d’ailleurs typiquement des chwaux ou des ânes qui ruent ou se cabrent.
Par extension, tout ce qui est « têtu » ou « indocile » aura de fortes chances – que dis-je ? le privilège – de se voir appliquer l’épithète.
Avec tout ça, on en oublierait presque le verbe, récalcitrer (plus guère usité et quel dommage car pt-pt, comment s’en lasser ?). C’est à lui, en réalité, qu’on doit l’adjectif (attesté en 1551) et le substantif (des membres d’une secte protestante furent ainsi appelés en 1721).
Remercions surtout le latin recalcitrare, « regimber » donc, venu appuyer calcitrare de même sens. Le tout dérivant de calx, « talon ». A priori, point ne tiltez-vous : ça n’a rien donné, ça, calx. Calx, je vous demande un peu. On dirait un acronyme, c’est dire si on n’y croit pas.
Et chaussure ?
CHAUSSSSSSSUUUUUURE !
Bon sang mais c’est bien sûr !
Et allez ! Calceare, « mettre des chaucëures, chausser ».
Encore plus net, calcare/calquer, « fouler, presser », autrement dit « faire une empreinte ».
Sans oublier inculcare/inculquer, « tasser du pied » pour bien faire rentrer…
Ne voyez aucune ironie dans le fait que vous ne parveniez pas à les enfiler, ces grolles : c’est toujours au niveau du talon que ça récalcitre.
Merci de votre attention.