Pour peu qu’un écriteau, une enseigne, un fronton, un hiéroglyphe quelconque vienne à croiser le regard du touriste, son premier réflexe sera de le lire à haute voix. Et ce, quel que soit le degré de pittoresque de la chose (jusqu’à bien au-dessous de zéro).
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Vu la mine réjouie de l’intéressé, essayons tant bien que mal de tenter de nous mettre dans sa tête. Qu’est-ce qui le pousse à retrousser les babines pour déchiffrer tout haut ?
* Est-ce pour retrouver le plaisir du bambin apprenant à lire, pour qui le moindre énoncé est prétexte à s’époumouner ? Non, car depuis le cours primaire, la fierté de montrer à qui veut l’entendre qu’on possède des rudiments de lecture s’est tarie, sans aucun doute.
* Est-ce pour mieux s’approprier l’inscription ? Non plus, son second réflexe, quasi-concomitant au premier, étant de l’immortaliser en photo (en vain puisqu’il ne la regardera plus jamais par la suite).
* Pour mieux en faire profiter la cantonade alors ? Tout juste peut-on trouver un début d’explication de ce côté-là : le découvreur grille ses potes. Or il lui suffirait de les attirer par la manche sans un bruit pour ne pas éventer leur propre plaisir. C’est donc qu’il ne les considère pas comme de vrais potes.
Rendons-nous à l’évidence : de même que le gniard de tout à l’heure se plaît à recenser tout ce qu’il reconnaît, il est dans la nature du badaud loin de chez lui de tout commenter bien fort. En accordant d’autant plus d’importance aux détails insignifiants qu’ils lui rappelleront tel ou tel de son coin à lui.
Pour ne plus subir ces lectures publiques intempestives, la seule solution serait d’expédier le touriste en Chine. Ou dans tout autre pays de sauvages où l’alphabet local n’évoque rien de connu.
Mer-ci-de-votre-at-ten-tion.