D’aucuns rêvent que nous rêverions de devenir milliardaires. Que nous servirait tout ce pognon si, les doigts de pied en éventail sur notre yacht, on le prononçait [jaʃt] (comme acheter) ou [jaʁt] (comme caviar-party) ?
Mais revenons à nos moutons, moutons.
A ce sujet, la prononciation [jɔt] (comme flotte) soutient mal la comparaison avec le [jot] qui se traînait à l’origine (par attirance pour boat ?).
Pour être précis, le tout premier yacht se disait même [jak], à la hollandaise. Faudrait pas perdre de vue qu’en 1570, un
iachte de guerre
n’est encore qu’un « petit navire de type hollandais ». Devenu un siècle plus tard « petit navire de type anglais ». C’est dire les impatiences grand-bretonnes.
Jusqu’à rencontrer son destin de yacht ou de yac en 1831 :
bâtiment de plaisance, ayant la distribution intérieure d’une petite maison, toutes les commodités pour le coucher, le manger.
En 1930, le Larousse en est encore à préconiser [jak], [jakt] ou [jot]. C’est dire le nombre de couches de peinture.
A force de passer de main en main, l’embarcation est rebaptisée yeaghe par les Anglais mi-XVIe. Elle désigne alors un « petit bateau rapide ». C’est dire l’embonpoint pris par la carlingue depuis.
En cause, jaght, norvégien et vieux néerlandais issu du bas germain jacht, aphérèse de jachtschip, stricto sensu « bateau de chasse » pour faire la course aux pirates. C’est dire si l’utilité première s’est perdue en haute mer.
Jacht est le digne substantif du verbe jagen (« chasser »). D’ailleurs, il y a fort à parier que les yah ! et autres taïaut ! taillés pour fondre plus vite sur la proie en sont l’expression onomatopéique (ce qu’on cause bien, ici). Dans l’absolu, rien ne vous empêche de crier tayacht ! en abordant les navires zennemis.
Toujourzétil que jagen repose sur la racine teuto-gothique yago-, elle-même ensemencée par l’indo-européen yek-, « chasser » mais aussi « parler ».
Assez jacté.
Merci de votre attention.