Emploi du temps

 

Arrêtons de courir dans tous les sens, surtout si c’est pour en blâmer l’« emploi du temps » :

j’ai un emploi du temps très chargé.

Hors système scolaire, nous employons notre temps comme bon nous semble. L’honnêteté nous obligerait à dire :

j’ai chargé mon temps avec des tas de choses inutiles.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Que vous soyez puissant ou misérable, les heures feront toujours 60 minutes et les journées 24 heures. Le temps est le même pour tout le monde, il n’y a que son emploi qui change.

Relatif et absolu qu’on retrouve en bisbille dans d’autres locutions : saut du lit mais descente de lit. On ne saute (ou on ne descend mollement, vu l’emploi du temps de la semaine) que d’un seul lit, en principe. En revanche, le tapis n’est pas propre à un lit en particulier. Si nous avions tous la même descente de lit, alors là oui, descente du lit serait tout à fait valable. Idem pour table de chevet, housse de couette, etc. Notez que drap du dessus reprend ses droits car il n’y a qu’un seul dessus.

 

Comme on n’a pas prise sur ce temps uniforme, l’emploi du temps permet de tout ramener à soi :

j’ai un emploi du temps de ministre.

L’inverse est vrai aussi :

j’ai un trou dans mon emploi du temps.

Fort bien mais trou du cul ? Ne devrait-on pas dire « trou de cul » puisque personne n’a le même (sauf les siamois, qui l’ont dans l’os) ?
Au lieu de ça :

J’ai un trou du cul très chargé.

Hors système scolaire, nous employons notre cul comme bon nous semble. L’honnêteté nous obligerait à dire :

j’ai chargé mon fion avec des tas de choses inutiles.

Attention,

j’ai un trou du cul de ministre

ne retentira que dans les bouches habilitées, qui se comptent sur les doigts d’une main : le ministre en question (quoiqu’alors on frise le pléonasme) et le président.

Merci de votre attention.

 

Ministre

 

Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne,

fit Jean-Pierre Chevènement un jour où il n’avait pas sa langue dans sa poche.
Mémorable saillie frappée, du point de vue de la langue précisément, au coin du bon sens.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Car à l’origine, est ministre « celui qui accomplit une tâche au service de quelqu’un ». Plus précisément « du roi » ou d’un « souverain », avant que les sans-culotte ne relèguent les ministres aux seuls ors de la République.

Parallèlement, dès l’an de grâce 1174, un ministre se met « au service de Dieu » ; difficile de monter plus haut dans la pyramide. Chez les cathos, on parle même de « ministre du culte ». Quant aux premières moutures d’administrer, n’équivalent-elles pas purement et simplement à « servir à l’autel » ? Meuh alors.

 

Et pourquoi diable un ministre a-t-il toujours l’oreille de celui qui commande, à la fin ?
Parce qu’il vient tout droit du latin minister, exact contraire de magister, le « maître ». Magistral, non ?

 

Vu sous cet angle, vaudrait-il pas mieux nous défaire de ce ministre un brin anachronique ?

Car comme le rappelait Jacques Chirac, ankylosé par un caillou à l’Intérieur de sa chaussure présidentielle :

Je décide, il exécute.

Sur le modèle du président/prae-sidium (« celui qui est assis devant »), affublons dorénavant chaque ministre du nom de redident, celui qui végète à l’arrière.

Merci de votre attention.