Comment en finir avec les accidents de la route plutôt que dedans ?

 

Mes moutons, vous en conviendrez : si la baisse du nombre d’accidents se poursuit, ceux-ci seront bientôt réduits à néant. Pourquoi ne pas précipiter ce jour heureux ? Mettons-y un bon coup pour que l’horreur cesse complètement.

Ne serait-ce que pour les raisons suivantes :

– ça épargnera du boulot aux pompiers venus vous désincarcérer en plein yam’s toutes affaires cessantes.
– vous contribuerez au reboisement de forêts entières initialement destinées à la fabrication de millions de constats s’empilant bêtement dans le fond de la boîte à gants.
– le terme accidentogène n’aura plus lieu de retentir.
– surtout, plus personne ne subira les spots laborieux de la prévention routière. Hein que ça vaut le coup ?

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La simplicité avec laquelle se règlerait le problème est confondante.

Même dans le cas où vous fonceriez délibérément dans le décor, pourrait-on stricto sensu parler d’« accident » ? Voyez qu’on tend de manière asymptotique vers le zéro.
Et si on vous avait dit ce matin que vous croiseriez la route d’une « asymptote », vous auriez aussitôt replongé dans votre code, histoire de vous rafraîchir la mémoire.

 

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en conducteur civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  73 % des accidents ont lieu sur le trajet de la maison. Déménagez !

 

♦  Inutile de vous le répéter, l’enfer, c’est les autres. N’empruntez que des routes de pub (l’équivalent du modèle d’exposition pour les commerçants). Coûte un peu cher à la location mais vous diviserez le risque d’accident par 948063425134782.

 

♦  Organisez le carambolage du siècle à l’échelle planétaire, dont vous aurez pris soin d’être le seul survivant. Tout le monde ayant embouti tout le monde, ambulances et flicaille comprises, à vous les priorités grillées en toute insouciance. Revers de la médaille, vous n’aurez plus l’immense plaisir de doubler le khônnard de devant, ah oui.

 

♦  Les accidents survenant en voiture, il suffirait, si l’on vous suit, de supprimer tous les véhicules à moteur. Laissez là vos syllogismes. Et comment regagneriez-vous vos pénates ? Certainement pas en espadrilles ni sur une selle quelconque. Non, pour éradiquer les accidents de la route, pas trente-six solutions : supprimer la route.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.

 

Tarauder

 

Faraud, maraud… De tous les paronymes que l’ancien françois a eu la délicatesse de faire parvenir jusqu’à nous, tarauder n’a pas pris le coup de vieux réglementaire. Avant que l’affaire nous taraude, examinons le pourquoi du comment.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Y’a pas à creuser bien loin : tarauder au sens propre équivaut à « creuser, percer », et plus précisément « percer avec une tarière ». Tarière, quésaco ? « Grande vrille pour percer le bois », chère à nos zancêtres les Gaulois dont les Romains jaloux rapportèrent le taratrum : taraud.

Enfin, orthographe garantie depuis 1676 parce qu’avant, hein, il y eut taraut (1567), tarault (1538), tareau (1216), variante de tarel, passé par tarelle, déformation de tariere. Je vous vois venir : si on s’arrête maintenant, jamais on repart. Allez go go go : tarere (1180-90), tariedre (fin XIe), taredres (début XIe), taradros (VIIIe siècle), d’origine celtique. On sent que les bouquins manquaient cruellement à l’époque, z’écrivaient un peu à la va-comme-je-te-vrille, les aïeux.

D’aucuns expliquent l’évolution en tarière par l’ancien verbe tarier, « exciter, taquiner ». Mais si l’on zieute vers le tar anglais (« goudron »), c’est une piste bougrement moins cahoteuse qui se dessine. Liquide visqueux, coulant du vieil anglais teoru, teru, « résine », qu’on retrouve plus au nord et à l’est sous des formes approchantes, dérivant toutes de l’indo-européen deru-, dreu- qui a donné tree

Si bien qu’un taraud pour « percer le bois », pas de quoi tomber de l’arbre hein.

D’ailleurs, incroyable mais vrai, cette racine deru-, sur laquelle bourgeonnait l’idée de « fermeté, solidité », a poussé en true.

 

Meuh ne nous voilons pas la face, « tourmenter de manière lancinante au point de faire souffrir plus ou moins vivement » est le sens (figuré) le plus usité de tarauder, dont on entrevoit soudain mais oui c’est vrai ça la parenté avec tarabuster.

Toujours ce vieux radical tar-, dont le t marque pour les linguistes acharnés « le commencement d’un bruit, tandis que le r final, strident, donne l’impression d’une fin indéterminée » et sur lequel est sans doute venu se poser le tarin, ce petit oiseau à bec pointu qui, tiens donc, loge dans les résineux.

 

Afin d’éviter que cette étymo ne parte en vrille, notez que tout calembour sur tarot vous aura été épargné.

Merci de votre attention.

 

« Timber »

 

… fait le bûcheron le soir au fond des bois. S’il appartient toutefois au gang des chemises à carreaux, ces jean-foutre doublés d’oiseaux de mauvais augure, trop butés pour changer de motif ne serait-ce qu’une fois de temps en temps, ces sous-hommes aussi khôns qu’une cognée, n’ayons pas peur des mots.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Pourquoi « Timber » et non « ‘tention » ou « chaud devant », sommations tout aussi explicites ? Avouez que jusqu’à maintenant, le cri vous semblait né par pur hasard du fruste esprit d’un sylviculteur canadien vers 1912. Zélote d’une divinité de l’érable qui plus est.
Funeste erreur.
Il ne vous aura pas échappé que cet avertissement retentissait exclusivement lors de la chute d’un arbre. Au moment où une barre d’immeubles implose, point l’artificier ne se fendra-t-il d’un « Timber » triomphal. Notre mot du jour trouverait-il ses racines en forêt ?

Meuh bien sûr ! Elles ont poussé dans le vieil anglois timber, « construction, structure » puis « matériel, bois de charpente », de là « tout type de bois » (pas bégueules in those days). Plus à l’Est et plus enfoui encore, on tombe sur le proto-germanique temran (celui-là même dont une branche a donné l’allemand Zimmer, « chambre »).
Et puisqu’on en est à tout déterrer, l’indo-européen demrom- fait bientôt surface, formé sur le radical commun dem-/dom- exprimant peu ou prou l’idée de « baraque » (que nous avons domestiquée, oui oui, comme tout le monde).

 

Tiiiiiiiimbeeeeeeer !

revient donc à hurler

Bois de charpeeeeeeeeeeeente !

à la cantonade censée retirer ses miches d’en dessous.
Les pégus en vichy craignent aussi peu la redondance que le bambin sur son pot constatant :

Caca.

On dira ce qu’on voudra, dans le genre bas de plafond, ça scie.

Merci de votre attention.