Aisselles de deux jours

 

Dans le style m’as-tu-vu des rasoirs à plein de lames, les déodorants clament désormais 48h d’efficacité. Leurs confrères à usage quotidien n’ont plus qu’à aller se rhabiller – avec des auréoles là où je pense.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

D’où sortent ces super-déos ? Testés sur des souris, probablement. Mais les souris ont beau s’agiter dans tous les sens, elles ne transpirent point. Pas plus que tout le règne animal c’est vrai ça (sauf les clebs un peu, par la truffe).
L’argument de vente fait donc pschitt, comme le spray.

 

« 48h » ? Pas de déo un jour sur deux (c’est ça que ça veut dire).

Mais alors, là où y’a d’l’hygiène, y’a pas d’plaisir ? Plutôt agréable au contraire, cette oxygénation des cavités. Vaporisée, la caresse devient même sonore. Et puis sans fraîcheur Narta, à quoi rimerait toute cette chorégraphie d’abord.

 

« 48h » : désodorisation en marche même le deuxième jour.

Diantre fichtre foutre. En principe, nous nous lavons 7 jours sur 7, 365 jours par an (sauf exemptés ou phacochères de service). Ce qui inclut à chaque fois les aisselles, zones sudoripares par excellence. Z’allez pas me dire que le déo de la veille résiste à un rinçage plus un essuyage consciencieux ? A moins qu’on puisse se dispenser de se récurer à cet endroit-là ? Si c’est le cas, la notice devrait l’indiquer, faute de quoi les clients mécontents iront se plaindre à la maison-mère. En poquant épouvantablement.

 

A supposer même que les super-déos agissent vraiment deux fois plus longtemps, les fabricants se tirent une balle dans le pied, à bout touchant : on en achètera deux fois moins, de leur bazar. Antiperspirant ? Antiperspicace, oui.

 

Imaginez un dentifrice du même tonneau, doté de super-pouvoirs éliminant le caca de dents pour toute la journée (48h, c’est pas pour tout de suite). Trois repas sans vous rafraîchir le four, vous vous rueriez, vous ?
Zindustriels, vous pouvez toujours vous brosser.

Merci de votre attention.

 

Le pitch

 

Entre l’animateur et l’acteur d’un film quelconque, vient toujours le moment où celui-ci demande à celui-là d’en dévoiler « le pitch ». Puisse la datation au carbone 14 permettre aux linguistes du futur de déterminer avec précision quand, poutch, le terme est apparu. N’ayons foi qu’en la science.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Délaissant argument, histoire ou scénario (de la promo de papa que tous ces mots ringards), un sombre khouillon crut bon de sortir un jour « pitch », non du cartable (comme les brioches homonymes) mais du chapeau. Où alla-t-il le chercher ? Sûrement pas chez les anglo-saxons, où pitch signifie soit « résine », soit « something that is pitched » (autrement dit un piquet de tente ou assimilés), soit un jet (de pierre), soit la hauteur d’une note, soit au sens figuré un « degré » ou un « point ». Nothing qui ressemble de près ou de très très loin au résumé du film, à l’évidence.

En capillo-tractant un peu, sachant que la langue de Shakespeare désigne aussi par pitcher un lanceur au base-ball, on fera éventuellement le rapprochement avec le fait d’émoustiller son public en ne « lançant » que les trois phrases susceptibles d’esquisser l’histoire…

 

Encore plus fort que la cranberry déjà pressée ici : le mot français supplanté par un mot angliche non équivalent. Si c’est pas de la frime à la petite semaine ça, les cocos !

 

Face aux prochaines tentatives de « pitch », une petite pensée pour les piquets de tente (ou assimilés), les jets (de pierre), les notes, les degrés et les points.

Merci de votre attention.