« Petit garçon »

 

Est-il mioche, ce pléonasme. Et si ce calembour laisse lui aussi à désirer, il ne doit pas nous détourner du sujet, toujours occulté du reste : un garçon est déjà un « petit gars », les mecs.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Point n’est besoin de bûcher son étymo en cachette pour piger que garçon est à gars ce que glaçon est à glace, de même que salon descend de salle, mamelon de mamelle et bien sûr, [coller ici votre exemple].

Puisqu’on en est à jacter tétés, donne-t-on du diminutif à fillette ? Bigre non, ce synonyme de « petite fille » est si transparent qu’on s’en contente.

Section félins, chaton, lionceau font eux aussi l’économie de la « petitesse », et pour cause.

 

Un vague scrupule nous pousse bien de temps en temps à remplacer « petit garçon » par garçonnet. On s’acharne. Et pourquoi pas « fillettine » ? Miniaturisation à double fond !
Les mômes, vengez-vous de tous les « vieux adultes » comme ils le méritent.

 

Faut s’entendre sur les mots, commencez-vous à geindre. Gars implique nécessairement du poil aux pattes. Et ne saurait être mis sur le même plan qu’une fille du sexe féminin, autrement dit une femme en devenir. Objection que contrediront tous les épisodes d’Un gars/une fille, mes moutons.

 

Par ailleurs, dire d’une « petite femme » qu’elle est une femmelette ne vous réconciliera pas avec la langue, sauf si l’intéressée se dégonfle. On emploie alors le terme de « petite garce » et on lui tire la langue sans ménagement.

 

En bref, « petit garçon » ne devrait être réservé qu’aux garçons de café courts sur pattes.
A l’autre extrême, laissez tomber « grand garçon », comme il vous laissera tomber lui-même en terrasse – la faute à un appareil auditif trop éloigné du niveau de la mer probablement.

Garçon ne s’accommode pas des épithètes. Laissons-le tranquille.

Merci de votre attention.

 

Bar à ongles

 

Certains mots épousent tellement la mode qu’ils passent comme une lettre à la poste. Dommage car en les reluquant de plus près, on s’esclaffe à peu de frais attentiooon : « bar à ongles » !
(‘ci beaucoup, merci).

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Ayé ? Bien remis ? Imaginez la poilade quotidienne au registre du commerce où s’inscrivent ces fleurissants (et sans doute florissants) établissements. Il est vrai que le bar est de moins en moins généraliste. Se multiplient ainsi les bars à vins, où l’on compare la minéralité de divers pichtegrus mais également les bars à eaux, où l’on compare la minéralité de diverses flottes. Sans oublier les bars à tartines, à huîtres, à frites, à goudas, à mines et tutti et quanti…

L’intérêt du phénomène se discute. Mais, en principe, est servi au comptoir ce qui est indiqué sur l’enseigne. La devanture d’un bar à ongles a donc de quoi glacer le sang : y consomme-t-on des ongles ?

Parce que, hein, le concept remonte à la nuit des temps : on y pratique la manucure, ni plus ni moins. Mais pour que la greluche de la dernière pluie ait l’impression, d’une part, de ne rien faire comme sa mère-grand trop la honte, et de moins raquer de l’autre, hop ! place au bar, jamais ringard par définition. Raymonde va chez l’esthéticienne, Fiona dans son bar à peau préféré (ha, vous jure qu’à Paris ça existe, j’ai des témoins). Suffit de jouer sur la hauteur des tabourets, une vague ressemblance entre le plan de travail et le zinc : tac, la clientèle mordra.

Pauvres nénettes, obligées d’ingurgiter toute cette kératine à leur âge. Et que dire des bars à sourcils et des bars à maquillage ? Imprudente theuneththe ! (‘Tendez, theveu thur la langue.) Et le blush aux hormones ?

 

Faites gaffe les cocottes, le sens de bar se barre. A ce train-là, dans vingt piges, plus un seul « salon de coiffure », que des bars à brushings. Vous moquez pas, dans la capitale décidément à la pointe du progrès s’ouvrent déjà des bars à chignons.

Quant à lunule, cuticule et, découverte du jour, onychophagie, voilà l’occasion rêvée de les caser. Tout sourire, sans le secours du moindre bar à sourire.

Merci de votre attention.