« Fin de non-recevoir »

 

Vous en conviendrez, « fin de non-recevoir » est le nom savant pour bide, vent et assimilés. « Savant » façon savant fou : suffit de démonter le fourbi pour s’en convaincre. A la dévisseuse, sinon on n’a pas fini.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Car où se donne-t-on du « cher confrère », raide comme la justice malgré la robe ? Vous l’avez pigé, il n’y a qu’en droit qu’on cause comme ça. « Fin de non-recevoir » y côtoie allègrement d’autres formes figées par on ne sait quel prodige (« mandat d’amener », « ordonnance de soit-communiqué »…). Passons.

 

Dans le code de procédure civile donc,

constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande (…).

Tout s’éclaire. Mais contemplez le sort réservé à recevoir ! Précédé de la négation, le verbe se mue en substantif sans que personne ne moufte.
Mettez donc « non-recevoir » à côté de non-lieu. Trouvez pas qu’il y a lieu de s’inquiétude ?

Quitte à employer un nom, pourquoi pas

fin de non-recevabilité ?

Hideux mais correct.

 

Gardons le meilleur pour la fin. C’est vrai, à quoi rime-t-elle, celle-là, à la fin ?
Si le « non-recevoir » s’arrête, c’est pour prendre désormais en compte la demande jugée recevable. La tournure entière devient alors irrecevable.

Quoique ! Moins par moins égale plus. Dans ce cas, tout baigne : c’est bien par une « fin de non-recevoir » que l’on se fait recevoir, et en beauté.

 

Le fin mot de l’histoire ? Fin est ici un « but juridiquement poursuivi » (v. « à toutes fins utiles »). Mais on n’a pas rêvé, dans la définition citée plus haut, elle est le

moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande.

Moralité : au barreau comme ailleurs, la fin justifie les moyens.

Merci de votre attention.

 

Où aller se faire foutre ?

 

Il arrive régulièrement que votre interlocuteur, sous le coup d’une émotion légitime, vous prie d’aller vous faire foutre. Cette demande souffre d’imprécision. Vous êtes pourtant tout disposé à contenter votre prochain. Mais sans aide de sa part, vous ne saurez pas chercher ni à qui vous adresser, n’étant guère coutumier du genre d’endroits prévus à cet effet.

Même gageure dans le cas où il vous faudrait aller

voir là-bas si j’y suis.

En général, celui qui vous le conseille ne s’embarrasse pas plus de détails sur le lieu du rendez-vous.

Si par contre on vous enjoint à aller

vous faire voir chez les Grecs,

la question ne se pose plus, évidemment. Il vous suffira de faire acte de présence sous l’Acropole, pour la plus grande joie des Chinois touristes.

Mais pour ce qui est d’aller vous faire foutre, le problème reste entier.

 

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en exécutant civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  Epargnez-vous une consultation des pages jaunes : entre ferronniers et fromagers, nul « fouteur » à l’horizon. Les bons « fouteurs » d’ailleurs n’existent plus et – autant que les choses soient bien faites – il importe de se méfier des « fouteurs » de merde.
De même, dans votre quête effrénée d’un professionnel, attention à ne pas vous allouer les services d’un empailleur quand vous pensiez avoir lu « empapaouteur » ou il pourrait vous en cuire.

annuaire

♦  La solution la plus indiquée pour aller vous faire foutre consiste plutôt à dénicher un « foutoir ». Repérez de préférence ceux que l’on appelle aussi « bordels » en laissant de côté Bronx (trop lointain) et autres capharnaüms dispendieux.

 

♦  A défaut, immergez-vous, façon enquête-de-terrain-en-caméra-cachée, dans le monde enchanteur du tapin. L’opération pourrait de surcroît vous rapporter quelques subsides. Veillez dans ce cas à sortir couvert, même le temps d’un soir.

 

♦  Pour parer au plus pressé, gagnez le centre pénitentiaire le plus proche. En quelques minutes, vous vous serez fait foutre par une bonne dizaine de prisonniers triés sur le volet qui, du fait de leur condition difficile, n’attendaient que votre venue pour savourer ce moment de bonheur (surtout si vous êtes une fille du sexe féminin).

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.