Comment chercher une aiguille dans une botte de foin ?

 

Certaines entreprises paraissent insurmontables. Vider la mer avec une petite cuiller, mettre Paris en bouteille, résister à l’apéro, autant de chimères tournées en dérision par la sagesse populaire.
Mais celle-ci ne verse-t-elle pas dans un défaitisme excessif en maugréant : autant chercher une aiguille dans une botte de foin ? Car enfin, si l’aiguille s’est retrouvée là, rien ne devrait vous empêcher de l’en extraire plus ou moins rapidos.

Quant à savoir ce qu’elle y fout, c’est une autre paire de manches – cousues main, au demeurant. On ne voit pas le père Michel perdre son chas (c’est le nom du moissonneur), ni la Marie couche-toi là semer ainsi son nécessaire à couture, tous deux ayant par-dessus le marché pour habitude de retourner les foins torse à l’air.

Ce sera plutôt un sale tour qu’on vous aura joué ; prenez-le comme un défi. Sans compter la valeur sentimentale que vous attachez à cette aiguille en particulier.

botte-de-foin

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en limier civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  Un travail de fourmi ? Précisément. Mettez vos meilleures renifleuses apprivoisées sur le coup, elles vous débusqueront n’importe quelle aiguille en moins de deux.

 

♦  Lancez une moissonneuse-batteuse à friction (modèle Majorette) à l’affût de l’aiguille. Naguère fastidieux, l’exercice deviendra tout à fait récréatif, notamment quand le jouet clignotera de tous ses feux en touchant au but.

 

♦  Et le détecteur de métaux ? Il bippera comme un damné lui aussi, une fois déménagé de l’aéroport à la grange.

 

♦  S’il s’agit de retrouver les aiguilles à tricoter de Lucette, celles-là même qui s’entrechoquent le soir au coin du feu (ou au fond des bois quand Marcel gonfle trop Lucette), vous n’aurez aucun mal à les repérer : elles seront fichées dans le foin comme dans une pelote d’épingles en vue des prochaines mailles.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.

 

Cartoon

 

Le permis, la rencontre avec l’âme sœur, les waters salvateurs où vous vous soulageâtes in extremis n’atteindront jamais cette acmé existentielle : les cartoons.
On parle ici des dingueries ciselées à l’ancienne, qui faisaient en six-sept minutes le tour de la question.

Votre auriculaire vous susurre que cartoon serait une déformation états-unienne des cartons qui défilent au générique. Que vous soyez changé en coyote si cette hypothèse faisait pschitt (ou –  pfffhhhhhh  –, tel le canidé poissard s’abîmant en contrebas).

Mais revenons à nos ovidés, moutons.

L’émission Ça cartoon !, ça ne nous rajeunit pas, fit les beaux jours d’une chaîne cryptée. Cartoon cartonne : le calembour retomberait-il comme un soufflé ? J’en ai peur, il y a du vrai dans cette histoire de carton. Qui cependant commence après l’entrée en fanfare, avec les images elles-mêmes.
Dès la fin du XVIIe siècle, carton désigne un dessin servant de modèle, réalisé sur un papier épais qui en prendra le nom. Avec l’essor des magazines illustrés outre-Atlantique, le terme y devient cartoon en 1843. Puis synonyme de « dessin animé » quand le genre porte les comics à l’écran au milieu des années 1910. Mettez-vous à la place des animateurs de la Warner ou de la MGM peaufinant les crayonnés qui marqueront les moments clé d’une séquence : autant de cartons formant cartoon.

De même, un salon dont le tord-boyaux favorise le glaviot viril s’appellera saloon. Rien à voir avec les bars chic en bordure de lagon où ne se sirotent que des Blue Lagoon. Je vous laisse avec Platon et Platoon, faites pour le mieux.

 

Une aphérèse popularisée par Roger Rabbit va jusqu’à baptiser toons les personnages de cartoons. Hors de contrôle, ceux-ci mènent leur « vie » propre dans le monde réel… lui-même fiction sous l’œil de la caméra. Ton sur ton : ç’a fait un carton, mes moutons.

That’s all folks !