« La question noire »

 

Pour commémorer la mort de Martin Luther King, rien de tel qu’un « spécialiste de la question noire ». Il y a de quoi se poser des questions, et des regards noirs qui se perdent. Faisons un rêve : et si on avait mal entendu ?

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Un gonze interrogé à cette occase jugeait l’expression « le problème noir » trop fétide pour être honnête. Et d’enquiller allègrement sur « la question noire ». Moins problématique, assurément.

 

Sauf que si « question noire » il y a, il faut la régler. Et même lui trouver une « solution » rapidos. Toute ressemblance avec une « question juive » de sinistre mémoire ne serait que pure coïncidence.

En sus, parler de « question noire » suppose une « question blanche », dont on se demande dans quel esprit suprématiste elle pourrait germer.

 

‘Tention, s’agit pas de nier que tout n’est pas rose. Mais en faire une « question » revenant sur le tapis, c’est ramener les Noirs – sous couvert de « neutralité » du vocabulaire – à leur condition de caillou dans la chaussure.

Prenons de la hauteur. « La question raciale » alors ? Etant donné qu’il ne saurait être question de « races », là encore, on s’écharpe pour rien. Le seul vrai ennemi de l’Homme, c’est la khônnerie, qui ne connaît ni couleurs ni frontières. Mais on ne peut quand même pas s’entretuer jusqu’au dernier, ce serait trop khôn.

 

Une fois n’est pas coutume, laissons-nous séduire par un faux-ami : en anglais, question au sens de problème se dit issue. Et si la réponse était dans la « réponse noire » ?

A force d’envisager, même sociologiquement, la coexistence des Noirs, Jaunes, Rouges, Mauves tirant sur le Bleu et Blancs crème comme une « question » à résoudre, point ne faudra-t-il chouiner si les communautés en question se sentent visées.
Alors que les individus qui en font partie, eux, ne demandaient qu’à rester peinards.

Merci de votre attention.

 

Reprendre c’est voler

 

Les albums de reprises ont au moins cette vertu d’être impitoyables pour les « artistes » invités ne valant pas tripette par ailleurs. Hein ! On n’est jamais déçu du résultat : pendant que nos chaussettes se barrent en trombe en faisant « kaï ! kaï ! », le dinosaure dont c’est l’hommage se retourne dans sa tombe à coups de triples axels.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Par exemple, Les oiseaux de passage, sorti en l’honneur de Brassens en 2011, aligne Yann Tiersen, Arthur H, Tarmac, Miossec, Les Têtes Raides, Saez… On en oublie un peu sur les bords, du gratin comme ça, ce serait dommage de s’en priver.
Ça loupe pas. La plupart de ces zozos se donnent le mot pour massacrer non seulement la lettre :

Un p’tit coin d’parapluie pour un coin d’paradis…

(pour pour contre, en quel honneur ? mystère)
… mais aussi l’esprit du grand Georges.
Gants, masque, pincettes, auscultons La Ballade des gens qui sont nés quelque part, par Tarmac (ex-Louise Attaque). Vous vous souvenez de Louise Attaque ? ‘Tention va falloir serrer les dents :

Ji voudrrais qui ti té raméééénes au vâânt…

Sont pas bégueules à la Sacem. En l’espèce, ceux-là te me trouvent le moyen d’évacuer la mélodie, de refourguer leur « harmonie » maison (tout en quintes, se sont arrêtés à la quinte) puis, dans un dernier sursaut d’impuissance, de ne ressusciter l’air qu’à moitié vers la fin.
Y’a d’autres métiers sinon.

Bon ben pour les cas désespérés, à quand un permis de reprise ? A n’accorder qu’avec parcimonie, s’entend, les élèves surpassant le maître se comptent sur les doigts d’une paluche. Rares sont les Crosby, Stills & Nash à avoir fait leur un Beatlesque Blackbird au point d’instiller le doute quant à la paternité du bijou. Pour parvenir à ce tour de force, encore faut-il savoir écrire soi-même et pousser la chansonnette, histoire de s’imprégner de la sève d’origine pour en bouturer un rameau unique.
Bref, piger un peu comment marche une chanson.

 

Les albums de reprises partent d’un bon sentiment. Dommage qu’on s’y foute un peu trop ouvertement de notre gueule.
Pourquoi confier des perles à des butors qui manifestement ne les sifflent pas sous la douche ?

Merci de votre attention.