Héros

 

Comme les héros ne suffisaient pas, il a fallu inventer des super-héros dotés de super-pouvoirs. C’était super-pas la peine, ainsi que nous l’allons voir.

Mais revenons à nos moutons, super-moutons.

D’ores et déjà, le féminin héroïne ne vous paraît-il pas étrange ? Vu la terminaison du mâle, on aurait pu s’attendre à « hérosse ». Mettons ça sur le compte de la non-prononciation du s. Et du vieux français heroe, pompé au XIVe siècle sur le pluriel latino-grec heroes (encore en vigueur chez les Anglais). Ce qui explique l’air de famille entre héroïne, héroïque et héroïsme. Si les anti-héros font fureur, d’anti-héroïne, point. Pourtant, l’intrus ici, c’est héros. Et il doit son rang à la déesse Hêra, qui n’est autre que la nénette à Zeus, excusez du peu.

 

Justement, héros est un « demi-dieu ». On n’est pas très à l’aise à l’idée qu’il meure. C’est pourquoi les scénaristes se décarcassent toujours pour qu’il s’en tire. Ou qu’il ressuscite symboliquement, quitte à biseauter la vraisemblance en suppositoires (v. la fin de Castle).

 

Mais alors, qu’est-ce que super- vient faire là-dedans, si ce n’est semer le pléonasme ? Et que ne s’est-on contenté de l’appeler demi-dieu ?

La raison tient au fait que le héros (quoi qu’il s’en défende, car il est modeste) est un « défenseur » de la veuve et de l’orphelin avant tout. Une casquette qu’il a vissée sur la tête depuis l’indo-européen ser-, « veiller, protéger ». Si ça ne vous dit rien, observez observer. Sans parler de préserver, réserver ou conserver jalousement.

 

Une autre héroïne est censée, par intraveineuse, provoquer l’exaltation (d’où son nom). On n’est pas très à l’aise à l’idée qu’on en meure.

Merci de votre attention.

« Piqûre de rappel »

 

Seule expression de toute la langue à base de piqûre, figurez-vous. « Piqûre de moustique » n’a pas de sens figuré. Elle ne prête donc pas à rire. Pas plus que « piqûre d’abeille » qui n’a pas de sens du tout, car cette fière héroïne pollinisatrice se pique de ne pas piquer l’homme. « Piqûre d’héroïne » relève donc de la poudre aux yeux.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

« Piqûre de rappel » constitue en sus une excellente « piqûre de rappel » concernant l’orthographe de piqûre. Seul mot de toute la langue avec un u portant chapeau après q, figurez-vous. C’est pourquoi la variante « picouze de rappel » n’offre pas grand intérêt.

 

« Piqûre de rappel » est une mise en abyme top fraîcheur. C’est là son seul mérite.

Car celle-ci occasionne une gêne persistante. Est-ce à dire qu’on y injecte du « rappel » ? Ne serait-ce pas plutôt la « piqûre » elle-même qui servirait à « rappeler » quelque chose ? Ce serait une révolution dans le monde de la piqûre. Qui, jusque-là, se contentait de soigner (si c’est une infirmière) ou de pomper le sang (si c’est un moustique femelle on n’y peut rien c’est la nature, filles du sexe féminin).

 

Et depuis quand un « rappel » s’inocule-t-il en intraveineuse ?

Ah pis alors, rien à voir avec le « rappel » du vaccin. Auquel cas c’est le vacciné qu’on « rappelle » lorsque les premières piqûres cessent de faire effet. D’ailleurs, si le « rappel » vaccinait contre l’oubli, il devrait exister des rappels de « rappel ». Or, on n’en voit jamais la couleur. Tout juste de nouvelles « piqûres de rappel », de plus en plus humiliantes.

 

En apparence anodine, une « piqûre de rappel » peut, on le voit, entraîner un état de grande confusion. Mieux vaut donc l’éviter.

 

La semaine prochaine, nous procéderons à l’examen de « délai de rigueur ».

Merci de votre attention.