Comment réussir un gâteau parfait sans œufs, sans gluten, sans beurre, sans lait, sans sucre, sans eau et sans électricité ?

 

Bien sûr que c’est possible ! A condition d’avoir un moule et un minimum de volonté.
Poilus dans les tranchées, Amundsen sur la banquise, Bombard au milieu de l’océan… Imaginez-vous tous ces grands garçons résignés à l’heure du dessert ? Contre vents et marées qu’ils se le faisaient, leur rata, convaincus que la vie aurait toujours raison de l’adversité.

Certes, en milieu tempéré par temps de paix, nous nous faisons quelquefois chier l’ennui gagne. D’où l’utilité de se recréer des contraintes. Si possible en mettant tout sur le dos de votre foi, histoire de vous rendre intéressant. Porc prohibé 7 jours sur 7 ici, là poisson mais uniquement le vendredi… C’est rigolo comme tout !

Mais la foi finit elle aussi par lasser. Heureusement, il vous reste l’excuse du foie.
Pour vos gâteaux, choisissez donc des ingrédients de substitution qui aient assez le vent en poupe pour ne pas vous causer d’allergies, ni d’aigreurs, ni de petits boutons. A vos tabliers ! (D’ailleurs le tablier ne s’avérera pas moins superflu, vu le peu d’ingrédients mobilisés).

 

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en pâtissier civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  Un gâteau goûtu ? Vous n’en êtes plus là. D’ailleurs qui a dit qu’il devait être comestible ? Faites donc d’une pierre deux coups et assemblez comme une pièce montée l’innommable bordel qui encombre votre débarras. Du mastic pour lier le tout, vos convives n’y verront que du feu de chalumeau.

 

♦  A pied, à vélo, à dada, en voiture (non électrique), ralliez la capitale au Finistère. Votre Paris-Brest ne pourra souffrir aucune contestation.

paris-brest

♦  De même, profitez de votre prochain passage au bloc opératoire pour enfiler un calot trop petit. Vous obtiendrez une superbe charlotte aux fraises.

 

♦  Mollo tout de même au moment de fourrer vos religieuses.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.

 

Patate

 

« Pomme de terre » : vertigineuse appellation. Même avec beaucoup d’imagination, rien dans son fuselage oblong ne rappelle la rotondité d’une pomme. Idem pour « cochon d’Inde » ; à pisser, quand on y songe.
Voilà pourquoi sans doute nous préférons désigner le tubercule chéri sous le nom de patate.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Si mémère est attestée depuis 1762 dans nos dictionnaires, il convient d’éplucher son itinéraire depuis le début.

 

Tout semble avoir germé du quechua papa, encore utilisé de nos jours en Amérique hispanique. Ce qui ne laisse pas d’intriguer quand on sait que le verbe latin papare, très antérieur, signifie rien moins que « manger »…

Paparenthèse : paper a existé en ancien français. En est issu papoter, d’abord « manger sans entrain, chipoter » puis « bavarder », l’onomatopée pap- évoquant le mouvement des lèvres (si si !).

 

On papote on papote et pendant ce temps-là, batata naît en 1516 en langue arawak d’Haïti. Les Espagnols l’auraient repiquée telle quelle en 1519. Dans un récit de voyage de Magellan en français, elle devient battate vers 1525, puis patata en espagnol en 1528. Dans la foulée, nous autres laissons tomber le b puis le second t. Et la « plante des régions chaudes cultivée pour ses gros tubercules comestibles à chair douceâtre » termine sa tournée mondiale grâce aux marins ibériques.

Sur notre sol, vous allez rire, on ne la cultive que comme plante d’ornement. Jusqu’à ce que Parmentier arrive et alors là, puuurée…

 

Observons enfin que par une curieuse facétie de l’argot, elle fait son lit de notre état d’esprit du moment :

avoir la patate ;
en avoir gros sur la patate.

C’est l’écrasante supériorité de patate sur « pomme de terre ».

Merci de votre attention.