« Partir sur »

 

On était parti sur « on est sur » il y a déjà fort jolie lurette. On en avait oublié « partir sur » dites donc.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Les toqués médiatiques ne se privent pourtant pas de scénariser à longueur de recettes :

on est parti sur un coulis de fruits rouges.

 

Déjà, on ne part que vers ou pour, hein. A la limite, sur un vol à destination de. Mais assez pleuré sur sur. D’autant qu’une variante avec avec s’invite de plus en plus souvent :

on part avec un coulis de fruits rouges.

Sans que ça tache les bagages ?

 

Notez aussi que « partir sur » s’utilise toujours avec on. Personne ne s’y risque à la première personne, ni à la deuxième, ni même avec un pronom défini quel qu’il soit.

Un plat serait-il une aventure collective où l’émulation donnerait naissance à des associations insoupçonnées ? Evidemment non. C’est l’idée d’un seul mec (ou nana du sexe féminin). Exécutée à plusieurs, à la rigueur (l’idée, pas la nana du sexe féminin). Lorsqu’elle est vraiment réussie, on parle de « spécialité du chef » (ou du chef du sexe féminin).

 

Mais le plus grave, c’est qu’on a beau « partir sur », on n’« arrive » jamais « sur » quoi que ce soit. Alors que le plat est abouti, de toute évidence.
Le produit fini diffère-t-il à ce point de l’idée de départ ? Evidemment non. Pas de chemins de traverse, au contraire ; mieux vaut qu’il sache où il va, le chef.

 

« Partir sur » affiche une spontanéité de façade. Et quand la locution se nappe de diplomatie montée en chantilly :

on peut partir sur,

le summum est atteint, comme la tarte du même nom.
Il y a peu de chance que les sœurs Tatin soient parties bille en tête sur un concept aussi louf.

Merci de votre attention.

 

Ahuri

 

Le succès d’ahuri est tel qu’il se décline en deux versions (nom et adjectif). Un ahuri arbore un air ahuri 24h/24, étant tombé dans l’ahurissement quand il était petit.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Si l’on emploie volontiers ahurir au figuré :

jeter dans la stupéfaction, frapper d’étonnement,

le verbe signifie proprement

faire perdre la tête.

Vos vieux réflexes vous soufflent déjà la suite.
A- pour passer d’un état à un autre, -ir, infinitif, le tout emboîté à la hure du sanglier furetant dans les forêts gauloises. Obélix, quand tu nous tiens.
Ce que confirme l’ahuri de 1270 :

qui a une chevelure hérissée.

Comme qui, comme qui ? Sus scrofa, pour vous servir.

 

Hure, au même siècle, désigne ainsi la

tête hirsute d’une bête féroce.

Mais arrêtons-nous sur hirsute. Serait-ce pas la même racine (de cheveux) ? Et hair par la même occasion ?

En effet, on n’a pas donné un coup de peigne à hirsute depuis le latin hirsutus, qui rime avec Bluetooth (là n’est pas son moindre défaut). Hirsutus, irsu d’hirtus de même sens, descend de ghers-, l’indo-européen pour dire « dru » ou « se dresser, se hérisser » (tiens donc). Hair a poussé là-dessus, le doute n’est plus permis.

 

Notez que pour les premiers zacadémiciens, ahurir était familier comme l’est aujourd’hui ahuri. Ahurissant, non ?

Merci de votre attention.