Parlons peu, parlons bien, parlons passion. Il suffit de comparer passion à compassion pour s’apercevoir que le passionné pâtit plus de sa passion qu’autre chose.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Qu’on se prenne de passion pour quelqu’un ou pour les timbres du Bélize, on n’en a jamais assez. D’où tac, frustration (qui mène le monde). D’où auuuugh, souffrance (qui nous perclut au point de nous rendre passifs).
Précisément, com-patir, c’est « souffrir avec ». Jusqu’à devenir compatibles, éventuellement. On s’étonne après ça que les passions soient destructrices. Et pourquoi retrouve-t-on ces s fossilisés en circonflexe dans pâtir et pas dans compatir ? Pour mieux brouiller les pistes, évidemment. Les Grecs, toujours plus malins que tout le monde, contournent le problème en faisant preuve d’empathie.
On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, no pain, no gain et autres dictons rabat-joie : toute passion n’est pas nécessairement une partie de plaisir. Parfois même, elle tient du chemin de croix : la Passion du Christ. Dieu merci, ça n’a pas existé.
En latin, passio naît de passus, participe de pati, « endurer, éprouver », cousin de paene (« peine », v. peinard) mais surtout fier paternel de patientia.
C’est vrai, dans la salle d’attente, le patient poireautant par paquets de trois quarts d’heure « souffre » comme jamais. L’expression « prendre son mal en patience » est taillée sur mesure, que dis-je ? cousue sur lui, ce qui n’arrange pas son cas. D’ailleurs, l’impatient ne « souffre » pas, en toute logique – ce que son comportement dément catégoriquement *.
Audiard :
Ça fait plaisir de te revoir, le Mexicain commençait à avoir des impatiences.
Songez enfin à la patience qu’il faut pour extraire la pulpe des fruits de la passion.
Meuh que c’est passionnant, l’étymo.
Merci de votre attention.
* v. celui dans votre dos à la Poste.