Placement de bifteck

 

Pour éviter toute forme de publicité déguisée dans les fictions, le céhèssa exige depuis un certain nombre de berges qu’apparaisse la mention suivante à l’orée du générique :

Ce programme comporte du placement de produit.

Pfioû, ça va mieux en le disant.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

La pub s’affiche donc au grand jour mais sous un faux nom. Et comme un téléspectateur averti en vaut deux, il peut dorénavant s’amuser à repérer des marques auxquelles il n’aurait pas prêté la moindre attention. Chouette, non ?

 

Depuis qu’alléluia, les chaînes publiques sont tenues de jarreter toute réclame après 20h, elles ne se privent plus de recourir à cette parade déjà ancienne, en accord avec les marketeux. Les tunnels de pub bannis de l’antenne ? Il reste le subliminal. Attendu que ce qui se déroule à l’écran a l’air de se passer dans la vraie vie, dans laquelle on croise des marques à tous les carrefours (je positive), celles-ci peuvent bien s’immiscer dans le feutré. Ou façon concentré de tomates, dans des programmes courts de type « consomag » juste avant le film, ça on a le droit, ça ?

 

La presse papier délaye pour sa part avec du vocable à consonance journalistique. De pleines pages de publi-communiqués et autres actualités commerciales jouxtent l’info. Et pourquoi pas

scoops et dernières annonces

pendant qu’on y est ?

 

Voilà pour le côté non assumé. Pour être complet, faudrait aussi railler la peur d’être hors les clous qui, seule, peut expliquer des inutilités de la trempe de

fumer tue

ou de

suggestion de présentation

sur les emballages de victuailles…

 

Auteur de mentions obligatoires, un métier d’avenir.

Merci de votre attention.

Comment raccrocher au nez d’un institut de sondage ?

 

Comme si les instituts de sondage avaient un nez. Et pourquoi pas du flair, hein ? ’Tendez un peu avant de rigoler, la principale absurdité arrive de suite.

Jugez plutôt : alors que vous avez toujours pris soin de ne figurer dans aucun annuaire (car « ne jamais parler à un inconnu » était la consigne), qu’il vous semblait par ailleurs avoir coché toutes les options de confidentialité censées tuer dans l’œuf toute tentative de démarchage, un institut trouve le moyen de vous déranger, à midi deux, pour s’enquérir de ce que vous regardez à la télévision, quel type de lave-linge vous chérissez ou pour quel candidat vous iriez voter dans trois piges si toutefois il se présentait.

Si la chose ne s’est jamais produite, c’est que votre bonne étoile deviendra bientôt supernova tant elle darde. Il se peut aussi que vous n’ayez pas le téléphone (ce qui vous épargne d’autres khouillonnades intempestives, mesurez bien votre chance).

 

Vous faites donc partie de l’« échantillon représentatif ». Gigantesque morceau de flan qu’il était grand temps d’attaquer par la face nord : nous y voilà.

Le concept part du principe que puisque vous avez tel âge, tel appareil génital, tel lieu de résidence et que vous exercez telle profession, votre parole et celle du millier de péquins interrogés vaudra au nom de tous les compatriotes (étant donné que « ne jamais généraliser » était la consigne, vous ne savez plus à quel saint vous vouer, vouais).
Péquins dont on comparera d’ailleurs l’avis à celui de mille autres plus tard (mais toujours en parlant des mêmes « français » hein) en vue de savants graphiques sur l’« évolution de l’opinion ».

S’est-on jamais autant poilé, entre nous ?

sondage

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en entubé sondé civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  A peine prononcé le nom de l’institut, friture sur la ligne. AlloaaaahjenevousentendsplusdésolééééééHOP !

 

♦  Si les scrupules vous assaillent, jouez franc jeu. Lorsque le sondeur vous demande avec une politesse surette si vous auriez quelques instants à lui accorder, répondez par la négative car la cuisson du risotto ou de la polenta ne souffre aucun dérangement.
Méfiez-vous : si l’autre est teigneux, il tentera d’embrayer sur vos marques préférées.

 

♦  Faites remarquer à votre interlocuteur qu’au petit jeu du « pas du tout satisfait/un peu satisfait/plutôt satisfait/très satisfait » vous excelliez déjà avec des marguerites mais que ça vous est passé.

 

♦  Comme dorénavant on ne vous la fait plus, objectez que l’échantillon vous semble trop réduit pour un sondage politique et suggérez une consultation à plus grande échelle, et pourquoi pas à taille réelle.
Quoique crotte : ça existe déjà. Des « élections », ça s’appelle.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.