Il fustige l’absurdité de la vie, les guillemets et les humoristes pas drôles, Jean-Louis Fournier est un frère d’armes. Si vous n’aimez rien tant que les feulements ordinaires magnifiés par l’écriture, foncez lire Ça m’agace !, son petit dernier. Identification maximale pour les moutons contrariés comme vous et moi !
Si vous préférez l’ouïr en interview (prononcé viouve car Jean-Louis Fournier n’est « plus un perdreau du jour » selon son expression), on peut dire que vous tombez bien : Rebecca Manzoni lui a récemment brossé le portrait. C’était dans Eclectik, émission de service et d’utilité publics par la seule présence du grain manzonien (épaisseur et espièglerie, LA femme faite voix, si j’ai une fille elle s’appellera Rebecca, sa maman aussi mais m’en fous). L’auteur y parle surtout de Mon dernier cheveu noir, sous-titré avec quelques conseils aux anciens jeunes, qu’il défend himself sur les planches. Impossible de citer un chapitre in extenso, ça vous priverait du plaisir de la découverte pis M’sieu Copyright ferait ses gros yeux. Impossible aussi d’amputer la moindre virgule. En guise de pis-aller, l’incipit, juste pour donner le ton :
De Radiguet, écrivain mort à vingt ans, Cocteau a dit :
« La première fois que je l’ai vu, j’ai compris qu’il nous était prêté et qu’il allait falloir le rendre. »De moi, on pourra dire :
« La première fois qu’on l’a vu, on a tout de suite compris qu’on ne pourrait pas le rendre et qu’il allait falloir se le garder un bon moment. »
Jean-Louis Fournier écrit dans un style simple et sec (il « déteste parce que », je cite toujours) des trucs d’une intelligence sans bornes, d’un cynisme parfois impitoyable mêlé de poésie. Il atteint d’autant mieux son but que le format est court.
La minute nécessaire de M. Cyclopède, vous vous souvenez ? Le gars qui filmait Desproges s’appelait Jean-Louis Fournier et non, c’étions pas un homonyme.
(Même l’horloge, c’était la sienne).
Ça vous pose un bonhomme, non ?