« Panne d’oreiller »

 

Quiconque se pointe à la bourrette invoquera pour sa défense une « panne d’oreiller ». Si le zig escompte vous endormir avec ça, c’est raté. Il faudrait se lever tôt pour gober un truc pareil.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

J’ai eu une panne d’oreiller.

L’oreiller n’ayant rien de mécanique dans sa conception, celui-ci ne saurait tomber en panne. D’où guillemets, clins d’œil et air entendu.

Mais pourquoi blâmer spécialement l’oreiller ? Serait-ce lui qui vous sort du lit lorsqu’il est censé « fonctionner » ? Il semble qu’au contraire son moelleux donne effrontément dans le reviens-y. D’ailleurs pendant ce temps-là, personne ne remet en cause la fiabilité de l’édredon, ni n’évoque la fourberie de la couette (pourtant maintes fois avérée). Quant au matelas, il n’est certainement pas tout blanc, dans l’histoire.

 

Si le coupable ne s’est pas réveillé, ne le doit-il pas plutôt à une panne de réveil ?
Notez que les guillemets disparaissent sur-le-champ. A tort : là encore, est-ce bien la peine de s’en prendre à ce fidèle compagnon de nuitée ?

Cuisiné comme il faut, votre retardataire reformulera : « le réveil n’a pas sonné ». S’il soulageait totalement sa conscience, il reconnaîtrait l’avoir mal réglé la veille. Ou pire, indiquerait que l’engin a bien retenti (car comment pourrait-il tomber en panne ?) mais que, n’en faisant qu’à sa tête (dans le derche donc), votre homme s’est rendormi comme une masse.

 

Cette pénible pirouette lui évite en réalité d’admettre qu’affronter votre tronche (particulièrement ce matin) était au-dessus de ses forces.

Pourtant, vu son faciès enfariné, « panne de cafetière » aurait constitué une explication plus plausible. Ou à défaut, « panne d’escalator », « panne d’ascenseur », « panne de voiture », « panne de transports en commun »…

 

Au prochain coup de la panne, vérifiez que ce n’est pas encore une histoire à dormir debout.

Merci de votre attention.

 

Consulting

 

C’est des coups à se cloîtrer chez soi : plus moyen de faire un pas dans la rue sans tomber sur un cabinet de consulting. Il semble que ces sociétés de conseil aient pignon sur ladite depuis un mini-quart de siècle. Pompé au monde anglo-saxon toujours à la pointe du flan de l’image, le consulting se targue en gros d’améliorer la stratégie des boîtes qui ont les moyens. Concept à faire dans sa culotte si le terme itself ne jurait autant dans le paysage linguistique.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Les gens qui pratiquent ce beau métier vendent donc leurs services à qui le demande, à l’instar des toubibs dans une autre branche. Rien à voir toutefois avec une consultation obligeant à faire aaah et à tousser sous la menace d’un stéthoscope tout froid : les consultants ne palpent que votre pognon. Pourquoi diantre ces spécialistes indépendants ne se font-ils pas appeler conseillers, comme le suggère la moins mauvaise traduction de l’anglais consultant ? Soyons sérieux, s’agit de rester nébuleux. On bombardera consultant le moindre sportif reconverti en… commentateur, je vous rappelle.

Curieux hein, ce besoin immémoriel de s’en remettre à quelqu’un pour s’entendre dire ce qu’on sait déjà (conjonction de fièvre et courbatures = grosse grippe) ou pire, ce que personne ne peut savoir (conjonction de Vénus et Mars = grand malheur).

 

Il va de soi que prononcer à la française un suffixe 100 % anglais derrière ce radical commun accentue grandement le toc de la chose. Et parking alors ? Pas pareil : le seul équivalent à n’avoir pas le cul entre deux côtes était aire de stationnement. Y’avait point photo.

Allez, sur l’échelle du ridicule, consulting ne culmine pas moins haut que « stationning » ; c’est mon avis et je le partage. Et pour peanuts en plus.

Merci de votre attention.