« J’ai pécho »

 

Ad nauseam, un site de rencontres d’un soir a recyclé en slogan l’expression « j’ai pécho » :

Les pubeux ont encore, encore, encore, encore, encore perdu une occasion de se taire.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Dans le coin inférieur, on est prié de croire que

pécho = séduire.

C’est à se tenir les côtes mutuellement.

Sans hurler avec les chiennes de garde, « pécho » est l’un des mots les plus détestables de tous les temps. Du moins, depuis l’invention du verlan, car à force d’essayer de le conjuguer (« pécho », bas de plafond, n’admettant que l’infinitif et le passé composé), on en oublie que

pécho = choper.

L’ombre du prédateur est encore accentuée par pêcher, dont la gémellité avec « pécho » ne joue pas en faveur du drôle.

 

Pour ne plus passer pour ce qu’il est, le plouc de base troquera donc le trop explicite

j’ai chopé une meuf

au profit de

j’ai pécho.

Notez que toute espèce de transitivité a disparu : « pécho » se suffit à lui-même, peu importe la meuf concernée. L’important est de coincer, d’attraper, de ferrer, et autres glorieux synonymes de « choper ».

Pour les relents de laitance séchée, c’est par ici.

 

Laborieusement, le spot tente aussi de mettre le verbe dans la bouche de Madame. Ultime égard pour la « cible » secondaire : les fille du sexe féminin ont peut-être envie de « pécho », elles aussi. En tout cas, elle sont consentantes.
Autant dire qu’on n’y croit pas une seconde. « Pécho » n’est utilisé que par les mâles dominants, c’est déjà bien assez.

 

Assumer « avoir pécho » sa conquête les yeux dans les yeux amène souvent celle-ci à le tégrére.

Merci de votre attention.

 

Attentionné

 

Zieutons-le attentivement : attentionné ressemble à un néologisme comme deux gouttes d’eau des fleurs. On a beau ne plus y prêter attention depuis le temps, rien ne dit que le crime est prescriptionné.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

D’après une source proche de l’enquête, nous aurions forgé attentionné à partir d’attention un jour de 1823 où il ne faisait pas beau. Ainsi, être attentionné revient à couvrir d’attentions son (le plus souvent, sa) partenaire (tiens c’est vrai, et l’égalité alors, filles du sexe féminin ?). Ce qui est, avant tout, une marque d’attention. Laquelle donne attentif jusqu’à preuve du contraire.

Aussi prévenant soit-il, attentionné arrive donc après la bataille.

 

Notez que celui qui multiplie les attentions ne dit jamais de lui-même qu’il est attentionné, ce qui contreviendrait à sa délicatesse légendaire. Sauf sur un CV, pour une âme sœur de passage :

grand, sportif, attentionné (…)

A se taper les adducteurs ! Est-on attentionné par nature avec n’importe qui ? Encore faut-il que les sentiments soient là.

 

Mais on s’égare.

Ne ferait-on pas fausse route depuis le début, d’ailleurs ? Vu ses airs de participe passé adjectivé (le verbe attentionner a eu son heure de gloire, ‘tention), on devrait plutôt qualifier d’attentionné l’être cher à qui l’attention est destinée. Gentlemen, soyez attentifs.

 

Au fait, au moment de recevoir une attention, ne vous contentez pas de la réceptionner, au risque de déceptionner l’attentionné.

Merci de votre attention, fallait pas.

 

En forme de cœur

 

Spontanément, vous pensez à ça :

Or, les cardiologues le voient plutôt comme ça :

Et qui aurait le cœur à les contredire ?

Mais revenons à nos moutons, moutons.

C’est vrai, on a beau l’inspecter sous tous les angles,

rien qui ressemble de près ou de loin à deux courbes qui finissent en pointe, symbole pourtant universel du siège des sentiments.

D’où vient que nous le figurons toujours de façon aussi cucul-la-praline de la sorte ? Avec ou sans crayon d’ailleurs : nos pouces et nos index réunis suffisent à recréer l’illusion. Et toute l’assistance de trouver ça gnangnan choupinet derechef.
Quant aux < 2 et < 3 du langage SMS, pourquoi ? Prrrt. Le mystère s’épaissit à la vitesse d’une béchamel au galop.

 

Graphiquement, certes, la chose est fermée, pleine et symétrique. Un cocon respirant l’harmonie. A ce compte-là, ceci :

aurait très bien pu faire l’affaire.

 

Inutile de tourner autour du pot : pour ces messieurs, ces deux orbes évoquent inconsciemment les vôtres, filles du sexe féminin, et votre propre attirail, mectons, pour ces dames. L’amour n’a rien à voir là-dedans.

 

Nous ferions de bien piètres anatomistes dites donc. D’ailleurs, avez-vous déjà vu un pancréas ou une vésicule stylisés ? Palpitant excepté, aucun organe vital n’a jamais l’honneur d’être représenté, a fortiori sur le tronc des arbres. Sans doute parce qu’on ne se relève pas d’un cancer du pancréas.
Mais d’une peine de cœur ?
Et d’une béchamel foutue ?

Merci de votre attention.

 

De s’en battre les khoûilles elles devraient arrêter

 

Non contentes de régresser au stade de meufs, certaines filles du sexe féminin vont jusqu’à clamer :

je m’en bats les khoûilles

aux khongénères qui les leur pètent.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Déjà peu amène dans la bouche de qui en est pourvu, « je m’en bats les khoûilles » est d’une laideur peu commune chez la locutrice en mal d’imagination. Elle n’a pourtant que l’embarras du choix pour faire fi des arguments d’en face :

ça n’a aucune importance, rien à foutre

ou, dans la gamme de voyage :

peu me chaut, je n’en ai cure.

 

En plus, c’est absurde. Serait-elle jalouse de la robinetterie de monsieur ? On ne peut pas le croire. Imaginez ce dernier affirmant qu’il s’en « bat le soutif ». Ou « les escalopes ». Il n’en fera jamais rien, ayant déjà bien assez à battre de deux glaouis – voire d’une meuf.

 

Parce que généralement, c’est au cours d’une dispute qu’on en vient à « s’en battre les khoûilles ». Avec une animosité qui contredit l’indifférence affichée, surtout précédée d’un « vas-y » ou d’un « t’sais quoi » – voire les deux.

Mais la formule est surtout révélatrice d’une tendance à tout faire comme les mecs. Que les intéressés encouragent parfois sans le vouloir. En se disant par exemple attirés par les « voix de fumeuses ». On peut à la rigueur trouver à l’organe voilé d’un vieux cancéreux une certaine sagesse. Mais comment ne pas souffrir pour celle dont les cordes vocales ne vibrent plus qu’à mi-grave ? Elle ne s’en bat certainement pas les khoûilles, dans l’intimité.

 

Et puis, c’est une histoire de rythme. « Je m’en bats les coucougnettes » n’aura jamais le péremptoire de son équivalent à « khoûilles ». Avec sa succession idéale de an, a, é et ou, « je m’en bats les khoûilles » clôt la discussion.
Remballez tout.

Merci de votre attention.

 

Comment se gratter en ayant les deux mains prises ?

 

Attendu qu’il reste rarement les bras ballants plus de trois secondes en moyenne, l’homme moderne passe son temps à avoir les mains prises. La femme moderne aussi d’ailleurs, qui par les courses, qui dans l’évier, qui aux fourneaux…
C’est alors qu’une terrible envie de se gratter se déclare. Choisit toujours son moment, celle-là.

Dans ce cas, il suffit de faire appel à un tiers de bonne volonté pour vous soulager, soit du contenu de vos pognes, soit l’épiderme directement.
Dans le couple, cette forme de caresse détournée permet d’atteindre des régions difficiles d’accès : le dos, entre les omoplates, le dos également…

Mais livré(e) à vous-même ?
Imaginez que vous soyez suspendu(e) au-dessus du vide. Ce ne serait rien, sans cette démangeaison inopportune. A la main, pour couronner le tout. Vous pouvez toujours vous gratter pour qu’on vienne vous tirer de votre inconfort.

 

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en gratteur civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

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♦  Vous ne pouvez vous empêcher de vous frotter frénétiquement le tibia. Problème : celui-ci dort dans le plâtre. Patientez trois petites semaines. Au pire, suppliez l’interne de viser juste avec son foret à béton.

 

♦  On vous a enfilé une camisole de force (ne protestez pas, c’est que vous l’aviez bien mérité). Survient l’envie de gratter. Il y a de quoi devenir fou, avouez. Ne vous plaignez pas, vous êtes déjà dans la place.

 

♦  De même que cireur de chaussures est un sacerdoce oublié, personne ne pense au gratteur de rue. Pourtant l’activité est promise à un bel avenir : la clientèle ne fait jamais défaut et s’extasie volontiers après le service rendu. Il ne vous reste qu’à lancer le concept.

 

♦  Portez à même la peau uniquement de gros pulls qui grattent, en proscrivant tout adoucissant.

 

♦  Glissez-vous subrepticement à la place de l’éponge magique sur l’évier de tout à l’heure. Vous aurez même le plaisir de lécher les plats pendant qu’on vous grattouille.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.

 

RIP jeunes gens

 

Comme si ça ne suffisait pas, juste avant la fiesta des épousailles, vos zamis procèdent vite vite à un enterrement de vie de jeune fille ou de garçon. But du jeu : vous ridiculiser en public en vous forçant à faire ce qu’ils pensent que vous ne pourriez plus faire une fois casé(e). Comprenez : tout ce qui ne vous aurait jamais traversé l’esprit, indépendamment du casage.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Exemples de bizutages : venir vous réveiller pour vous grimer en fille (si vous êtes un mâle) ou embrasser – littéralement – une tonne d’inconnus (si vous êtes une femelle équipée d’un pèse-personne). Y’a pas à dire, des zamis comme ça, on en redemande. Trop tard pour en avoir honte le jour J.

 

Tous les moyens sont bons pour se marrer (sur commande). Car toute la clique part du principe que ce sera votre dernière chance de vous marrer. D’où « enterrement ».

Autre postulat : l’amitié en prend un coup une fois le grand amour entériné. Vos futurs ex-potes se vengent donc par anticipation en se liguant contre vous. Et ne font qu’accélérer le processus, avec leurs khônneries.

Troisième case enfin (et non des moindres) dans laquelle on vous range : vos gonades. Tout représentant du sexe d’en face étant exclu, le rite tournera autour de « trucs de filles » ou inversement. Moutonnerie absolue, sous couvert de débridé à son zénith.

 

Les sites spécialisés y ont songé, qui proposent désormais une pratique mixte de la rigolade organisée : l’« enterrement de vie de jeune couple » (nom de code : EVJC, à ne pas confondre avec EVJF et EVG).
Consternant manque d’imagination. Pourquoi se limiter au matrimonial : à chaque étape de la vie, l’enterrement correspondant !

La veille de vos dix-huit ans : enterrement de vie de mineur. Dans un ultime sursaut d’immaturité, commettez en une journée les pires méfaits dont vos tuteurs légaux devront encore répondre.

La veille du permis de conduire : enterrement de vie de piéton (cumulable avec le précédent). Avec la complicité du moniteur, lâchez les lions : grillez stops et feux rouges, collez au cul pour rire ou foncez sur une mémé. En manœuvrant bien, vous pourrez même fêter l’enterrement de vie de mémé dans la foulée.

Merci de votre attention.

 

Cracher

 

Ainsi qu’il est dit dans l’Evangile selon Sainte Réclame,

T’as craché dans ton Yop ?! Eh mais c’est grave, ça !

Moins cependant que de cracher par terre sans raison.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Si le détenteur dudit yoghourt procède ainsi, c’est pour éviter qu’on le lui pique.
Précisément, le glaviot n’est-il point une résurgence animale consistant à marquer son territoire ?

Si oui, pourquoi les mectons seraient-ils les seuls concernés ? Ont-ils vu leur évolution contrariée par rapport à celle de leurs congénères à mamelons ? A moins que celles-ci n’aient pas de territoire à elles et comptent sur monsieur pour le PEL ?
Zieutez, zieutez, aucune fille du sexe féminin – hors Calamity Jane et camionneuses isolées – n’a besoin de s’affirmer au point de RRRRRRRRRRRKH, PTTT se racler le palais en quête d’un molard suffisamment ostensible.

Cracher passe donc pour un signe de virilité. Fluide projeté à dose et distance mesurables, forme et couleur distinctives… Là encore, toute ressemblance avec le clébard levant la patte le plus haut possible hein, connaissez le refrain.

Mais c’est surtout une preuve de la moutonnerie du mecton. Neuf fois sur dix, pris en flagrant délit, celui-ci avouera que c’était pour faire comme les petits copains.

 

A charge pour vous de lui rappeler alors que 1) son geste est moins élégant que se faire les crottes de nez, pisser contre un mur et se gratter les khoûilles en public réunis, 2) puisqu’il vise le milieu du trottoir, le seul moyen d’être encore plus irrespectueux serait de vous cracher directement à la gueule, 3) tous ses germes vous adoptent comme un seul homme, 4) le danger n’est pas mince de glisser dessus et surtout 5) ça ne sert à rien, rien et re-rien. Hypersalivation ? Indiquez-lui le toubib le plus proche. Dans le cas contraire, s’il a les commissures arides, rien ne l’empêche de se désaltérer en terrasse, ce qui augmentera pour le coup ses chances auprès des minettes.

 

Nous sommes au XXIe siècle. Economisons la salive, notre bien commun.

Merci de votre attention.

 

« Petit garçon »

 

Est-il mioche, ce pléonasme. Et si ce calembour laisse lui aussi à désirer, il ne doit pas nous détourner du sujet, toujours occulté du reste : un garçon est déjà un « petit gars », les mecs.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Point n’est besoin de bûcher son étymo en cachette pour piger que garçon est à gars ce que glaçon est à glace, de même que salon descend de salle, mamelon de mamelle et bien sûr, [coller ici votre exemple].

Puisqu’on en est à jacter tétés, donne-t-on du diminutif à fillette ? Bigre non, ce synonyme de « petite fille » est si transparent qu’on s’en contente.

Section félins, chaton, lionceau font eux aussi l’économie de la « petitesse », et pour cause.

 

Un vague scrupule nous pousse bien de temps en temps à remplacer « petit garçon » par garçonnet. On s’acharne. Et pourquoi pas « fillettine » ? Miniaturisation à double fond !
Les mômes, vengez-vous de tous les « vieux adultes » comme ils le méritent.

 

Faut s’entendre sur les mots, commencez-vous à geindre. Gars implique nécessairement du poil aux pattes. Et ne saurait être mis sur le même plan qu’une fille du sexe féminin, autrement dit une femme en devenir. Objection que contrediront tous les épisodes d’Un gars/une fille, mes moutons.

 

Par ailleurs, dire d’une « petite femme » qu’elle est une femmelette ne vous réconciliera pas avec la langue, sauf si l’intéressée se dégonfle. On emploie alors le terme de « petite garce » et on lui tire la langue sans ménagement.

 

En bref, « petit garçon » ne devrait être réservé qu’aux garçons de café courts sur pattes.
A l’autre extrême, laissez tomber « grand garçon », comme il vous laissera tomber lui-même en terrasse – la faute à un appareil auditif trop éloigné du niveau de la mer probablement.

Garçon ne s’accommode pas des épithètes. Laissons-le tranquille.

Merci de votre attention.

 

Fulgurance #95

Meneurs/suiveurs, attaque/défense, ami/ennemi, bourse/vie, fromage/dessert…
Quelles dichotomies absurdes/pertinentes !

Travailler cul nu

 

L’engeance mâle répartie à 52 % sur cette planète souffre d’un trouble auquel personne* ne prête attention : à peine entame-t-elle une activité manuelle (rafistolage, aspirage de voiture, changeage d’ampoule) qu’on lui voit les fesses.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Hein ! On n’invente rien : tandis que l’homme se penche sur l’ouvrage, toutes ses facultés intellectuelles sont mobilisées par cette putain de vis ; pas le temps de se rajuster le falzar, d’ailleurs il n’y songe guère.
(Mâles, on vole à votre secours, là).
Dès lors, ça ne loupe jamais, une force mystérieuse se met en branle, tout se retrousse et le popotin se découvre. Imperceptiblement d’abord, puis la raie apparaît à proportion de l’effort déployé.

A la décharge du pauvre bougre, si cette khônnasse de vis ne tournait pas à vide aussi putain de vérole de va chier de bordel de cul – on y revient.

Et n’allez pas croire que c’est pour épater la ou les nanas zalentour : devant ses semblables aussi bien que dans l’intimité, le phénomène survient quoi qu’il arrive.

 

Il ne peut être sans fondement (si l’on ose dire).
Y aurait-il un défaut dans l’amplitude de chaque vêtement de jambe masculin ?
Allons bon. Dans ce cas, comment expliquer que neuf fois sur dix le sous-vêtement vienne avec ?
Ne s’agit-il pas plutôt d’un plaisir secret, spécifique aux gonzes, consistant à révéler son postérieur à qui de droit pour bien montrer qu’on en chie (si l’on peut s’exprimer rainsi) ?

 

Salopette, combinaison, scaphandre, autant de solutions tout indiquées.
Ou alors le fantasme doit s’accomplir jusqu’au bout : tombez le bas, mecs, ce sera plus séant (décidément). Mais faites gaffe à tout ce qui pendouille, un accident est si vite arrivé.

Merci de votre attention.

 

* personne si ce n’est les 48 % restants de filles du sexe féminin, dont le minois consterné en dit long.