Priorité à droite toute

 

Tout frais du jour : interrogé sur la « préférence nationale » prônée par son groupuscule, un FNeux s’est empressé de répondre en termes de « priorité nationale ». L’acharnement avec lequel il tentait de caser ce nouveau zélément de langage pour faire oublier l’autre n’était rien à côté de celui qu’on mettra à le pulvériser.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Toujours aussi puant, le concept est néanmoins mieux emballé. Dès qu’on ouvrira le paquet en revanche, l’odeur risque de prendre un peu à la gorge. Mieux vaut ne pas revenir là-dessus.

 

Les aminches, il va falloir vous y faire, priorité a désormais priorité sur préférence. On voit un peu pourquoi.

La priorité à droite, ça ne se discute pas, c’est le code de la route. A mille lieues de la subjectivité suintant par tous les pores de préférer.

Avec ce dernier, vous passez ouvertement pour des racistes. De surcroît, une loi estampillée « préférence nationale » serait recta retoquée par le conseil constitutionnel, garant de l’égalité et de la fraternité républicaines. Ce que la chefaillonne du groupuscule, juriste à ses heures perdues, ne sait que trop.

Préférer marginalise. La priorité, au contraire, vous met du côté du droit. Sans elle, ce serait l’anarchie. Elle relève du « bon sens », cher au groupuscule (comme à tous les autres) parce qu’il s’oppose à toute idéologie. Ce qui n’empêchera pas l’affaire de sombrer dans l’anticonstitutionnalité la plus totale.

 

Mais faites gaffe : à force de vouloir gommer tous les mots qui encombrent – jusqu’au nom du groupuscule, devenu simple couleur, il ne va plus rester que du vent. Moins détectable que le zyklon B mais tout aussi volatil.

Merci de votre attention.

 

Limonade

 

Face à l’armada de sodas dont une lampée file le diabète, l’humilité des boissons sans marque fait sourire. Jusque dans leur nom délicieusement suranné : anis/anisade, orange/orangeade, pomme/pommade, j’en oublie. Or çà, limonade découlerait d’un obscur limon ? Nous aurait-ce écorché la langue de former un mot sur citron ?

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Nous avions déjà notre citronnade, je vous ferais dire, à ne pas confondre avec sa version gazeuse limonade. Le distinguo nécessitait-il un mot d’outre-Manche pour autant (lemonade) ? Allez roter vos âneries plus loin. Lemon n’est que l’avatar anglais de la lime qui, jusqu’à preuve du contraire, appartient à tout le monde.

Pour bien comprendre, brossons le tableau de famille des citrons. Une smala plus exactement, où le spécimen jaune (citrus medica) s’invite à table, soyons francs, nettement plus souvent que les limes (citrus aurantiifolia). Citron et lime viennent donc de deux souches différentes. Citron et citron vert itou, ce dernier n’étant qu’une variété de lime. Raison pour laquelle on peut aussi l’appeler limon, tout comme du reste son cousin à peau jaune en vieux français châtié.
Pour corser le tout, faut savoir que les Ricains ricanent aujourd’hui encore des Grands-Bretons, ce peuple de limeys que le jus de lime a sauvé du scorbut. Cliché d’un autre âge. Comme si nous désigniions par « face de citron » le niakoué lambda, allons allons.

J’en vois qui décrochent. Qu’à cela ne tienne : c’est parce que la Terre entière becquette indifféremment la lignée de lim- et de citr- que, d’une langue à l’autre, tout ça est devenu la même limonade.

 

Saviez-vous que sur nos côtes, les débitants de boissons furent longtemps appelés limonadiers ? C’est dire si nous l’aimons, la pétillante.

Merci de votre attention.