Allez expliquer à un enfant en bas âge le sens d’incomber. Vous pouvez toujours tenter de vous défiler, la tâche n’incombe à personne d’autre que vous.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Heureusement, en pareil cas, ces messieurs de l’Académie ont tout prévu :
être imposé, appartenir, revenir à [en parlant d’une charge, d’un devoir, d’une responsabilité].
Même pour les non physionomistes, incomber rappelle succomber. Au sens premier :
fléchir, s’affaisser, s’écrouler sous un poids, une charge qu’on n’a plus la force de soutenir.
Une histoire de poids, toujours.
On l’a oublié, et pour cause : au XVe siècle, incomber signifie encore « s’abattre sur ». Rapport au latin incumbere, « s’appuyer, peser sur ».
Quant à succumbere (alias sub-cumbere), c’est la même notion vue par l’autre bout : « s’affaisser sous ».
Incumbere n’est pas tombé de nulle part mais d’incubare, « être étendu, couché », formé sur l’indo-européen keu-, « pencher, plier ».
D’ailleurs, que vaut une incubation si l’œuf n’est pas couvé ? Tiens ben justement, couver (selon le principe du b qui vire en v) n’est autre que cubare qui a boyagé.
Et si le cubitus se termine en coude, c’est certainement pour pouvoir plier le bras. Sans ça, on aurait l’air fin.
Quant aux concubins, ils couchent ensemble, littéralement. Sans ça, ils auraient l’air fin.
Pire encore : dans la mythologie, incube et succube sont respectivement le « démon masculin, supposé abuser des femmes durant leur sommeil » et le « démon qui prend l’apparence d’une femme pour avoir des relations sexuelles avec un homme ».
Mieux vaut cacher tout ça à l’autre morveux.
Merci de votre attention.