Torviettes, serchons

 

Silence. Pitié pour le brave qui tente d’additionner des quarts d’heure en vue d’un total horaire qui tienne la route.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

La somme de 2h15 + 5h30 + 2h45 ne saute certes pas aux yeux.
A défaut d’une formule toute faite, deux écoles s’affrontent :

Séparer les blancs des jaunes.
Les quarts d’heure d’un côté, les heures de l’autre. L’inconvénient avec 9h90, c’est qu’il faut encore incorporer délicatement à la fin. Et par paquets de 60 sinon c’est raté.

Grimper palier par palier.
   2h15
+ 5h30
   7h45

+ 2h45
 10h30.
Les petits cumuls s’y prêtent bien. Mais s’ils tirent en longueur ? Gobez-les cul sec, sans quoi la tournée d’Aspégic est pour votre pomme.

 

Tout ça parce que les unités s’imbriquent comme des poupées russes.

Si les heures se suivent et se ressemblent, les minutes y sont limitées à 60, c’est le système sexagésimal qui veut ça. Libre à vous de repartir avec « sexagésimal » sous le bras ce jour.

Car la seconde est à la minute ce que la minute est à l’heure : une durée définie pour arranger tout le monde. Imaginez qu’1 minute équivale à 61 secondes. Ou à 1h47. Ou à une nuit de débauche.

N’escomptez donc pas, pauvres pécheurs, un résultat blanc ou noir en ajoutant de l’absolu (heure) à du relatif (quart d’heure).

 

Dans la même veine, à moins de penser H24, bon courage pour convertir des heures en journées.

Et les mois ? Font ce qu’ils veulent dans la vie, ceux-là. Un coup à 30 jours, un coup à 31, parfois deux fois de suite (pour ménager les susceptibilités d’augustes empereurs oubliés). Y’en a même à 28. Et à 29 mais seulement tous les quatre ans.

Malgré tout le mal qu’on se donne, on n’a pas prise sur le temps.

Merci de votre attention.

 

L’embouteillage est-il incréé ?

 

Embouteillage. L’image du goulot ne suffisait pas, il a fallu qu’on y ajoute le bouchon, c’est dire.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Théorème : dès qu’une file de bagnoles commence à grossir en un point de la planète, le ralentissement se mue tôt ou tard en surplace.

Pourquoi l’embouteillage est-il le plus important vecteur de frustration connu ici-bas ? Parce que le trajet est foutu ? Nooon, z’aviez pris la précaution de démarrer deux heures plus tôt car Bison Futé avait vu rouge pour ne pas dire noir.
A cause du retard qui s’accumule, impossible à évaluer ? La belle affaire, z’êtes en vacances hein. La montagne ne va pas s’envoler, non plus que la plage.

Non, si nous tous, juillettistes, aoûtiens, têtes de veaux, trépignons moteur coupé, c’est qu’on ne sait pas ce qui bouche.

 

Si celui de devant n’avance pas, on ne peut pas lui en vouloir : celui qui le précède en est exactement au même point, mort en l’occurrence (voilà pourquoi vous exciter sur le klaxon terminera d’user les nerfs de tout le monde au passage).
Mais, et c’est là où le mystère de l’embouteillage reste entier, il en faut bien un tout devant. Qu’est-ce qui l’empêche de rouler, celui-là ? Toute la route lui est offerte, par définition. Il faudrait déjà que le conducteur de tête soit à l’arrêt complet sans raison (au risque absurde d’un lynchage des suivants) pour interrompre un trafic jusque-là fluide.
Si, en temps normal, le premier automobiliste se voit contraint de s’arrêter au stop, au feu rouge ou au passage à niveau, celui de l’embouteillage a le pouvoir de créer une queue leu leu ex nihilo.

 

Plan de coupe du phénomène

embouteillage2

« C’est devant que ça roule pas » vaut jusqu’au véhicule n°2.
Le n°1 ne peut invoquer cet argument que si le bouchon fait le tour du globe,
ce que la répartition terre/mer exclut formellement.

 

De même que l’on bute indéfiniment sur ce qui a précédé le Big Bang, on ne peut, à moins d’un obstacle encore impensé, expliquer le lambinage du premier véhicule – pas plus que le redémarrage du troupeau. Un vertige métaphysique.

 

Quittons l’infiniment grand et observons maintenant la fourmilière la plus proche. Une myriade d’individus se ruant dans la même direction. Et toute la colonie circule comme un seul homme !
Conclusion : nous sommes plus khôns que les fourmis.

Merci de votre attention.

 

Brun de toilettes

 

Juillettiste, aoûtien, même combat. Trop souvent, le chemin de la pause pipi mène à ces aires d’autoroute pour lequel l’adjectif immonde semble avoir été inventé. Non pas les plus fréquentées, aux WC quotidiennement entretenus car intégrés au restaurant ou à la station-service. Je veux parler des cabanons généralement en briques n’offrant à l’estivant que la possibilité de se soulager – ou de se retenir encore 72 km, tant la pestilence y est insoutenable.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Allez savoir pourquoi, détergents et serpillières semblent avoir déserté depuis l’origine ces oasis de fétidité. Où viennent grossir nos propres humeurs : pissous de tribus nordiques, grosse commission belge, urine de Hollandais à caravane, générosité italienne, écoulements allemands, souvenirs du Portugal, gouttelettes anglaises, sécrétions du Liechtenstein, flaques helvétiques, Turques dans leur élément… Vous avez raison, vaut mieux pas savoir. Sur l’échelle de la civilisation, cet enfer sur terre, ce summum du refouloir, cette internationale de la pisse nous relèguent plus bas que l’animal. Lequel en effet n’assouvit jamais ses besoins en meute, marquant son territoire justement pour dissuader ses congénères d’y lever la patte.

Solution ? Déménager le péage pile à l’entrée, afin d’inciter les plus rétifs à l’élémentaire hygiène à faire dans les règles de l’art. Ou couper à travers champs et s’arrêter incognito au milieu des blés. Mais traînez pas, surtout que c’est le coin des renards.

 

Décidément impayable, une encyclo en ligne nous apprend que

ces aires sont très propres, les sanitaires sont nettoyés tous les jours par les services autoroutiers.

C’est bien simple, on pourrait manger par terre. Bon alors, jambon-beurre, saucisson, fromage, miasmes, qui veut quoi ? Wikipédistes, vous nous faites pisser de rire tiens.

Merci de votre attention.