Désordre à parents

 

Devant leur descendance, papa et maman parlent d’eux à la troisième personne :

une cuillère pour papa, une cuillère pour maman.

Or, dans la bouche de papa, « papa » désigne aussi bien lui-même que son propre père (le grand-père de l’autre). Et quand papa dit « maman », ne pense-t-il pas d’abord à la sienne ? Mamma mia, rien n’est simple en ce bas monde.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Z’aurez beau faire, il y aura toujours un cran de décalage. Si papa dit « pépé », il ne s’agit nullement du sien mais bien de celui du gniard, le pronom « ton » étant sous-entendu. D’ailleurs, précise-t-on « ton tonton » ? « Ta tata » ? Tatata. « Tonton », « tata ».

 

D’ailleurs, pour se repérer dans la parentèle, une astuce consiste à affubler les grands-parents de leur prénom. Ainsi, pour toute la famille, mamie Jacquotte est mamie Jacquotte. Mais songe-t-on parfois à la gêne occasionnée pour maman (sa fille) ? Et ce nom de code ne cantonne-t-il pas mamie dans sa condition de vieille peau ?

Ou alors on ne s’appelle plus que par son prénom, ce qui rajeunit Jacquotte mais décrédibilise maman et papa. En ce qui concerne le capitaine Haddock, les tintinophiles ne s’en sont toujours pas relevés.

Non, ne comptez pas sur nous pour réveiller ce traumatisme.

 

Autre astuce : des sobriquets différents selon le degré dans la généalogie. La mamie du petit n’est pas la mémé de papa, de même que pépé n’est pas papy.
Le hic, c’est qu’on a droit à deux mères-grand et autant de grands-pères. Cohabitent donc sur la même branche une mamie et un papy côté paternel, mémé/pépé côté maternel – ou l’inverse. Parfois même, pour des raisons inexpliquées, mamie et pépé vivent sous le même toit. Allez comprendre.

 

Mais que se passera-t-il au moment où le gosse pigera que l’arrière-grand-papa de papa bouffe les pissenlits par la racine ? Il fera le rapprochement avec son propre bisaïeul. Puis le fils de celui-ci, qui n’est autre que pépé. Cran de décalage après cran de décalage, il se retrouvera bientôt à hauteur de ses trois pommes.

Si les parents entretiennent l’illusion que tout tourne autour de leur progéniture, c’est pour éviter qu’elle ne sente prématurément le souffle de la mort sur son cou, voilà tout.

Merci de votre attention.

 

Comment pleurer sans oignons ?

 

Moment redouté, on vous somme de pleurer sur commande. Or, malgré tous vos efforts pour penser à quelque chose de triste (à vous en faire péter mirettes et méninges), rien ne vient. Le désert lacrymal.

A défaut de sentiments assez forts pour vous submerger là tout de suite, un oignon dépannerait certainement.

Hélas, pas l’ombre d’un à l’horizon ; d’échalotes, encore moins. Surtout dans le risotto, c’est quand même pas pareil. Quant aux gousses d’ail, elles ne vous seraient d’aucun secours, si ce n’est pour éloigner le mauvais œil ou les indésirables ; en d’autres circonstances peut-être.

 

De même qu’un kebab sans oignons paraît incongru (et pourquoi pas sans viande ou sans pain ?), larmoyer sans l’aide du bulbe salvateur ne va pas de soi.

couper-oignon-pleurer

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en chialeur civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  Alors quoi ? La simple idée d’être à court d’oignons ne vous tire pas des larmes, à vous ?

 

♦  Dites-vous qu’il vaut mieux pas d’oignon du tout qu’un oignon génétiquement modifié n’irritant plus l’œil. Si ça n’est pas à pleurer, ça.

 

♦  Profitez de la conjonctivite du petit dernier, si toutefois elle est contagieuse.

 

♦  D’autres formes de torture existent : le crissement du polystyrène, les plateaux de TF1, une radio jeunes en boucle, l’intégrale de Jean-Michel Jarre… Aussi radical que les enzymes.

 

♦  Déguisez-vous en madeleine.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.