A force d’avoir tout tout de suite tout le temps à portée de main, nous n’avons plus aucune patience. Heureusement, « d’une minute à l’autre » est là pour nous scotcher.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Pour mieux faire sentir l’imminence de l’événement, le journaleux dépêché sur place multiplie les « d’une minute à l’autre ». Malgré tous ses efforts, il n’y a aucun suspense : l’événement finit toujours par se produire. Généralement dès que le journaleux rend l’antenne.
Mais il y a pire : grammaticalement, la locution rappelle le passage « du coq à l’âne ». Or, on ne « passe » pas « d’une minute à l’autre ». Ou alors sans le faire exprès, quand l’action est à cheval sur deux minutes (ou unités temporelles successives).
Au lieu de faire la moue, remplacez minute par nuit. Vous pouvez toujours guetter le verdict, la prise de parole du candidat ou le lancement de la fusée. Les nuits étant interrompues par des jours, « d’une nuit à l’autre » électrise déjà moins les foules.
Alors que quand vous entendez retentir « d’une minute à l’autre », vous prenez vos dispositions pour être là au moment où ça commence. Qui est contenu dans une seule minute. Et même une seule seconde.
D’ailleurs, plus vous raccourcissez les intervalles, moins vous oserez quitter la pièce, de peur de tout louper :
d’une seconde à l’autre.
Et pourquoi pas
d’un centième à l’autre,
histoire de retenir tout à fait votre souffle ?
A l’extérieur, le journaleux ne connaît pas avec précision la minute fatidique. Si on ne lui en tient pas rigueur, il en va tout autrement de sa manie de meubler. C’est une question de minutes avant qu’on ne lui fasse bouffer son micro.
D’un bout à l’autre.
Merci de votre attention.