Chemise

 

La chemise étant de mise, on suspecte que la mettre se disait « chemettre » en des temps reculés.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Chemiser en tout cas existe, tous les cuistots savent ça :

garnir d’un revêtement protecteur,

notamment les patates.

N’inversons pas les rôles, le verbe émane de chemise. De même que miser, c’est mettre une mise et que remiser, c’est mettre à la remise, par exemple ses chemises immettables.

 

En examinant les coutures de la belle, on découvre que « chemise de force » désigne parfois la camisole du même nom. Capillus → cheveu, canis → chien, caballus → cheval, caput → chef… Faut-il pas chercher de ce côté-là, latinistes ?

Bingo. Qu’est-ce qu’une camisole sinon une chemise à manches particulièrement longues ? Tout ça naquit chamisae au Xe siècle. Remémorons-nous sans rire avec émotion l’époque où l’on repassait sa chamise, où l’on tombait la chamise et autres locutions où la chamise est en vedette.
Au fait, ceux qui utilisent l’expression « mouiller la chemise » seront condamnés à en porter une mouillée jusqu’à ce que mort s’ensuive.

 

Prisée des troufions latins, camisia fut probablement piquée aux Gaulois, qui eux-mêmes la tenaient des premiers Germains. La piste semble s’arrêter à hamithjan. Aujourd’hui encore, en léchant les vitrines allemandes, ce ne sont qu’Hemden à l’horizon. D’aucuns s’aventurent jusqu’à voir dans le grand-breton heaven l’ombre de cette « couverture », par l’entremise de l’indo-européen kem-, « couvrir ». Vous pouvez lever les yeux au ciel. C’est oublier un peu vite qu’une chemise « enveloppe » comme pas deux, sens qu’elle a gardé en papeterie et en cuisine on se répète (l’alu, pour les patates).

 

La Camif (Coopérative des Adhérents à la Mutuelle des Instituteurs de France) n’a qu’un lointain rapport avec la camisia d’origine, bien qu’on y trouve des chemises et même à l’occasion des chemisiers vachement sympa.

Merci de votre attention.

 

K-Way

 

A l’instar du poireau qui dépasse ou du nez qui coule à mille milles de tout mouchoir propre, le K-Way est un tue-l’amour. Quiconque revient ventre à terre du marché en reniflant dans sa capuche sous la bruine d’octobre avec les victuailles pour la soupe ne demande qu’à être mort ou changé en homme préhistorique.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

En guise de flash-back, contentons-nous d’un demi-siècle. Quelque part dans le Nord, le dénommé Léon-Claude Duhamel tient une boutique sur laquelle plane l’ombre du paternel, concepteur en son temps d’un des premiers impers en tissu caoutchouté. Notre homme, jusque-là dans le pantalon, commence à s’y sentir un peu engoncé. Tiens, se dit-il tout à trac, pourquoi pas un vêtement de pluie léger, copié sur les coupe-vent en nylon des pêcheurs bretons qui niveau houle en connaissent un rayon ? Le sieur Duhamel en pince tant pour la onzième lettre de l’alphabet qu’il se voit déjà vendre des « en-K » (d’averse). Une agence faisant la pluie et le beau temps sur le marché publicitaire lui conseille plutôt un nom à consonance anglo-saxonne : place à « K-Way ». Ah qua ouais, comme dirait Johnny, ça veut rien dire mais la belle affaire, c’est une belle affaire. Voulez qu’on s’attaque à l’étymo d’Haägen-Dazs, formé à la même époque du même bric et d’un broc similaire ?

Tiens ben causons boules. A quoi le K-Way doit-il son succès ? C’est un vêtement magique ! Le seul qui, par mimétisme avec la limace, se recroqueville à la première éclaircie avant de se transformer en banane. Ah le mirifique moignon. Ne refaisons pas le sketch, depuis Dany Boon, c’est un classique.

 

La France peut s’enorgueillir d’une telle réussite. Le K-Way a tout pour lui. On y est mouillé-collé pareil que sans, l’air abruti en sus.
Brave Monsieur Duhamel ! Il eût été plus avisé d’inventer le parapluie. La ruse, hélas, était éventée.

Merci de votre attention.