Volontiers

 

Mot d’un seul tenant qui engage totalement le locuteur, plus fort que oui, moins hypocrite qu’« avec plaisir », il transpire la classe et ne la ramène pas : volontiers est quasi-aphrodisiaque. Vous pouvez en abuser tant qu’il vous plaira.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

L’adverbe chéri, en sus, ne ressemble à rien de connu ! Pelle, pioche, détecteur de métaux : bon courage pour déterrer d’autres finales en –tiers.
Même en –iers.
Même en –ers.
Même en –rs (en dehors de toujours).
Même en –s (très rare, pour ainsi dire jamais).

C’est que le voluntarie latin (« volontairement, spontanément ») a tété les lolos de volere (« vouloir »). Chez nous, dès le Xe siècle, volentiers ou voluntiers exprimait ainsi cette idée ô combien généreuse : « je veux bien ».

A propos de volere (prononcé wolere, wous wous souwenez ?), on notera sans surprise que les sons qui s’ouvrent ou se ferment selon qu’on donne son accord à autrui ou qu’on l’envoie paître sont fort proches d’un patois à l’autre : oui/non, yes/no, ja/nein, sans oublier l’impayable waaw/déedéet wolof.

 

Et pour en revenir au latin, le verbe nolere, usité jadis comme son antonyme volere (« velis, nolis » : « bon gré, mal gré »), aurait très bien pu donner « noloir » et « nolontiers » quand on y pense.
D’ailleurs les philosophes amis des diptères emploient volontiers nolonté, comme cette vieille branche de Jankélévitch :

Dans la mesure où la volition est un événement qui peut advenir ou ne pas advenir en fait, il y a bien une faculté de vouloir et cette faculté s’actualise quand on en use, reste virtuelle quand on s’abstient ; en ce sens très général le pouvoir exprime une simple possibilité logique de volonté ou nolonté : l’homme est un être volontaire capable de ne pas vouloir, ou plutôt c’est un être volontaire qui n’est pas toujours voulant.

A resservir à nolonté.

Merci de votre attention.

 

Ad libitum

 

Faute de pouvoir traduire ad libitum par un synonyme 100% sûr, le français moyen en est réduit à chercher des équivalents : à l’envi, jusqu’à plus soif, jusqu’à épuisement des stocks, et plus si affinités.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Parmi tout ce qui précède, bien malin qui pourrait dire ce qui sur le plan littéral s’approche le plus de la locution latine. Raison pour laquelle nous l’avons conservée intacte, à tous les coups. Tout en lui donnant du « ad lib. », marque d’affection que nous ne réservons guère qu’à etc., excusez du peu.

 

On n’a pas toute la journée.

Ad : « à » avant la lettre. Préposition dont la particularité est de s’adjoindre tout ce qui passe.

Libitum fait de son côté furieusement penser à libido. Engagés sur cette pente du stupre, ne serions-nous pas en train de nous éloigner du sujet ?

Détrompez-vous. Libitus et « plaisir » sont cul et chemise, si si.

En Latinie, le mot voit le jour comme participe passé substantivé de libere, « plaire ». Car si « ich liebe dich », c’est d’abord parce que « tu me plais ». Et avant de nous lancer des noms d’oiseaux, souvenons-nous qu’un quolibet est à l’origine une question improvisée, débattue librement, selon quod libet : « ce qui plaît ».

Quant aux lubies qui se déclarent sans crier gare, elles bourgeonnent sur le verbe lubere, variante – on vous le donne en mille – de libere.

 

Pas étonnant que les partitions des musiciens regorgent d’ad libitum. Occasion rêvée pour l’interprète de jouer enfin selon son humeur, « à plaisir » ; moyen détourné pour le compositeur de ne pas trop se casser la nénette.

Merci de votre attention.

Implacable

 

Il suffit parfois de retourner la lorgnette pour que s’ouvre un abîme de perplexité. Pas pour impossible, improbable ou impitoyable avec lesquels on reste en terrain connu. Arrive implacable et là, on sèche. Contraire de « placable » : « que l’on peut plaquer » ?

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Dans cette affaire, obnubilé par son caractère tranché, on perd de vue le sens originel de l’adjectif : « qu’on ne peut apaiser ». Un emprunt au latin implacabilis, l’inverse (ah ?) de placabilis : « qui se laisse fléchir, qu’on peut apaiser » en parlant de quelqu’un.
Cherchons pas midi deux heures plus tard, ça vient du verbe placare, « apaiser, calmer, adoucir ». Nous nous laissions bêtement aveugler par le son [k], qui est tout sauf doux.

Index contre pommette, pouce sous le menton, réfléchissons : quelle descendance placare a-t-il laissée ?
Placide, mon bon monsieur.
Et c’est pas fini.
Bonnes pâtes, les placides ne font de tort à personne. Leur compagnie est agréable et, pour tout dire, plaisante. Précisément : ils ont tout pour plaire/placere (piacere en rital).

Même racine que plaisir au passage, employé comme verbe avant que plaire ne l’envoie se faire substantiver ailleurs. Si plaire nous a plus plu, c’est parce qu’il nous rappelait faire. Pas chien, on a fini par ajouter faire à plaisir pour faire plaisir à tout le monde.

 

Revenons-en à ce bon vieux placere, issu de l’indo-européen plak-, « calme » en parlant de la surface de l’eau. D’où placenta, à l’origine « gâteau, galette » voire « crêpe » (on ne rigole pas), le truc plat qui se mange, quoi…

 

Encore une démonstration implacable que tout est lié.

Merci de votre attention.

 

Travailler cul nu

 

L’engeance mâle répartie à 52 % sur cette planète souffre d’un trouble auquel personne* ne prête attention : à peine entame-t-elle une activité manuelle (rafistolage, aspirage de voiture, changeage d’ampoule) qu’on lui voit les fesses.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Hein ! On n’invente rien : tandis que l’homme se penche sur l’ouvrage, toutes ses facultés intellectuelles sont mobilisées par cette putain de vis ; pas le temps de se rajuster le falzar, d’ailleurs il n’y songe guère.
(Mâles, on vole à votre secours, là).
Dès lors, ça ne loupe jamais, une force mystérieuse se met en branle, tout se retrousse et le popotin se découvre. Imperceptiblement d’abord, puis la raie apparaît à proportion de l’effort déployé.

A la décharge du pauvre bougre, si cette khônnasse de vis ne tournait pas à vide aussi putain de vérole de va chier de bordel de cul – on y revient.

Et n’allez pas croire que c’est pour épater la ou les nanas zalentour : devant ses semblables aussi bien que dans l’intimité, le phénomène survient quoi qu’il arrive.

 

Il ne peut être sans fondement (si l’on ose dire).
Y aurait-il un défaut dans l’amplitude de chaque vêtement de jambe masculin ?
Allons bon. Dans ce cas, comment expliquer que neuf fois sur dix le sous-vêtement vienne avec ?
Ne s’agit-il pas plutôt d’un plaisir secret, spécifique aux gonzes, consistant à révéler son postérieur à qui de droit pour bien montrer qu’on en chie (si l’on peut s’exprimer rainsi) ?

 

Salopette, combinaison, scaphandre, autant de solutions tout indiquées.
Ou alors le fantasme doit s’accomplir jusqu’au bout : tombez le bas, mecs, ce sera plus séant (décidément). Mais faites gaffe à tout ce qui pendouille, un accident est si vite arrivé.

Merci de votre attention.

 

* personne si ce n’est les 48 % restants de filles du sexe féminin, dont le minois consterné en dit long.