Vous savez qu’il y a un truc. Et lui sait que vous le savez.
Ça ne l’empêche pas de passer consciencieusement les mains au-dessus de son attirail pour prouver qu’il n’est pas truqué.
Comme tous les moutons dans la salle, vous vous faites à cette idée. Mais votre for intérieur, toujours alerte, aura rectifié pour vous : ce n’est pas truqué à cet endroit-là.
A vrai dire, ce que vous trouvez fortiche est moins le tour en lui-même que la dissimulation du mécanisme. Si bien qu’à cet instant, vous assistez à tout sauf de la magie. A moins de considérer comme « magique » ce qui relève de l’inexpliqué. Auquel cas la khônnerie en tant que forme ultime de sorcellerie est promise à un bel avenir.
Votre « magicien » lui-même est certainement un peu atteint. Il lui suffirait de dévoiler ses trucs moyennant double tarif pour se changer les khôuilles en or – et ce ne serait toujours pas de la magie.
Publicité mensongère, donc. « Illusionniste » serait plus juste. Ou « prestidigitateur » à la rigueur, dont l’assonance rappelle celle d’abracadabra et qui, étymologiquement, vante simplement un individu preste de ses doigts.
Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en cartésien civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :
♦ Lorsque le « magicien » vous demande de choisir une carte, prétextez une phobie des cartes. Toujours plus rationnel que de jouer aux devinettes.
♦ Au moment de couper l’assistante en deux, exigez que la manœuvre soit exécutée hors de la boîte, afin de bien prouver que la scie n’est pas truquée.
♦ En coulisse, remplacez les colombes par des lapins. Ceux de départ, changés en d’autres lapins, apporteront une dimension tout aussi poétique (sinon plus) que l’oiseau de paix.
♦ Depuis Houdini, se défaire de ses chaînes en milieu hostile n’est qu’une formalité. Mettez le « magicien » à l’épreuve en l’encerclant de khôns de compétition dont il devra se débattre. Laissez-lui le temps qu’il faudra.
Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.