Manuel de suffixes

 

Vallsisme. Ça n’a pas loupé, on a osé faire le coup à certain ministre de l’Intérieur (comme à son prédécesseur en son temps). L’intéressé s’en est amusé en rétorquant pile ce qu’il fallait à la face du monde et des journaleux :

Tant que ce n’est pas les « vallseurs » ou les « vallseuses »…

Mais revenons à nos moutons, moutons.

A la minute même où un homme politique vole un peu de lumière aux autres, il est de bon ton (à défaut de goût) d’adjoindre –isme à son blase. Au motif qu’il ferait école ? Peuchère.

Ç’a pu coller en parlant d’une doctrine, qu’elle soit philosophique ou politique (socratisme, gaullisme). Ou d’un régime, généralement peu recommandable (pétainisme). Aujourd’hui, ce suffixe réflexe est tout juste une manière d’acter une manière de mousser un trait de caractère de l’homme de pouvoir. Tout à la joie d’inventer un mot, les interviouveurs le lui balancent aussitôt. Pas uniquement pour guetter sa réaction. Comme vallsisme n’a aucun sens, on somme Valls de lui en trouver un. Seul refuge : la pirouette.

 

Sans compter que la fin des zidéologies voue le procédé à une ringardise certaine.
Trouvez-m’en une née dans le dernier demi-siècle et y ayant prospéré.
‘Tention, concentration…
Bredouilles, hein ? Les médias ayant horreur du vide, ils se rabattent donc sur des gars, dont ils légitiment l’omniprésence (qu’ils ont eux-mêmes façonnée) mais dont on serait bien en peine de résumer la pensée profonde.

 

Essayez avec votre patronyme, pour voir. Ou celui d’un collègue, le petit teigneux, tiens, celui qui tire toujours la couverture à lui ; vous m’en direz des nouvelles.

Et si les professionnels de la profession se mettaient de temps en temps avec nous de l’autre côté de la lucarne ?
La peste soit du suivisme journalistique.

Merci de votre attention.

 

Les despotes sont nos potes

 

Guettez bien. Chaque fois que l’ONU fait les gros yeux à tel ou tel tyran du Moyen-Orient mettant son pays à feu et à sang, on se met illico à l’appeler par son petit nom : qui Bachar, qui Saddam

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Certes, trois fois certes, les types en question sont de gros affreux qui méritent qu’on se réfère à eux comme au mal absolu. Personnages inhumains pour tout dire, que la disparition du patronyme met à distance respectable de nous. Et identifiables d’emblée dans le grand scénar de l’actu. Mais quoi, c’est un peu comme si on les appelait Gargamel, non ?
« On », c’est les journaleux, vous aurez reconnu. Mais pas que.

En scrutant les autochtones au faîte de l’oppression, hurler leur rage face aux caméras zoccidentales, on parvient, sous la traduction, à discerner cette troublante familiarité en VO. Viendrait-ce pas d’une particularité géographique ?
Pas de vouvoiement dans cette région du monde, en effet. Ça n’explique pas bézef le caractère facultatif du nom de famille. Encore moins pourquoi nous reprenons la chose à notre compte de ce côté de la Méditerranée et jusque dans le discours de l’administration Barack ou George Deubeuliou auparavant.

Et Charlemagne ? Et Napoléon ? Quid d’Elizabeth ? On peut parler, nous, avec nos monarques ! Méchants (Ivan le Terrible), gentils (Louis XV le Bien-Aimé), tous à la même enseigne : la gloire tient dans le prénom, puisque le pouvoir est de droit divin.
Justement, l’est un peu derrière nous, ce temps-là. En quel honneur mettrait-on sur un piédestal des « guides » qui ont le « suprême » d’une pintade ratatinée, vu le joug subi par ceux d’en dessous ?

D’ailleurs, ç’a commencé quand, cette histoire ? Pas du temps d’Arafat, en tout cas. On n’a pas souvenir que le moindre envoyé spécial lui ait donné du Yasser et pourtant le drôle faisait bougrement partie des meubles. D’ailleurs, nombre d’entre vous ont longtemps cru que son véritable blase, au Yassé, était Rarafat (je le sais).
babar

Allez, vivement l’Eté arabe, qu’on oublie jusqu’au prénom de ces encombrants.

Merci de votre attention.