En tant que membre actif du gouvernement, impossible d’y couper : l’œil des caméras doit vous filmer sur le terrain en train de servir l’intérêt général serrer des pognes. Fini le temps où le suzerain du coin faisait régner l’ordre et la terreur en crevant les globes oculaires des vassaux qui osaient lever les yeux sur son étole. Depuis que la République est République, faire ami-ami avec vos zélecteurs est un passage obligé.
Vous ne pouvez cependant ignorer tous les dangers qu’implique l’exercice : prises à partie de citoyens mécontents, tartes à la crème quand ce ne sont pas des attentats purs et simples.
Un parcours ultra-balisé, des gorilles fidèles vous garantiront la plupart du temps un bain de foule sans accroc. Mais qu’en est-il en cas d’épidémie galopante, dont vos fonctions vous rendent comptable aux yeux des masses agglutinées ? Vous ne demandez pas mieux qu’à regagner en popularité mais, en allant ainsi d’une paluche à l’autre, vous colportez le virus à vous tout seul : une partouze de miasmes géante.
Représentant de la nation ? Son principal agent infectieux vous voulez dire.
Comment vous montrer en prise directe avec le peuple au moment même où vos propres services l’en dissuadent ?
C’est d’une schizophrénie sans nom. Ça au moins, c’est pas contagieux.
Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en démagogue civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :
♦ Confiez au plus baraqué de vos gorilles un petit lavabo portatif pour vous savonner les mains après chaque empoignade. Il courra le vider régulièrement au-dessus du caniveau le plus proche en tâchant de ne pas se saloper les pompes.
♦ Faites-vous greffer une prothèse à chaque bras, que vous prendrez soin de plonger dans un bain d’antiseptique une fois les caméras parties.
♦ Des gants ? Et pourquoi pas une combinaison ? Vous n’y pensez pas. Optez plutôt pour des coucous de près, ou un de ces petits saluts nazis qui vous éviteront de trop vous fouler et de vous frotter à votre Volk.
♦ Avant que d’installer votre barnum, dépistez les malades et offrez-leur un vaccin gratuit en compensation du chagrin qu’ils auraient à ne pas vous étreindre. Vous pourrez alors fendre une foule saine et y aller de vos « peuchour » et de vos « merci » en toute tranquillité.
Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.