Aller au restaurant, c’est avant tout vous faire plaisir. A condition d’être accompagné. Sans quoi, au sommet de l’échelle de la gêne, vous n’avez d’yeux que pour votre assiette.
Notez que dans votre antre, la solitude se supporte très bien à l’heure du repas. Elle commence à peser dès qu’il y a des témoins (vous pouvez méditer dans un coin peinard).
Pour ne rien arranger, vous échouez au milieu d’habitués qui, même attablés dans leur coin, peuvent donner le change en papotant avec le personnel.
Et l’embarras est contagieux. Songez aux efforts qu’il vous faut fournir pour avoir l’air détaché tout en écoutant aux portes et mâcher en ne fixant personne. C’est pour ça qu’on compatit alentour, plus encore que pour l’absence de convive.
Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en paria civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :
♦ Promettez une tournée générale.
♦ Repérez les autres clients solitaires et rapprochez vos tables. Il n’est pas nécessaire d’engager la conversation ; voyez Lucette et Marcel (qui mangent ensemble mais chacun de son côté).
♦ Emmenez votre poupée gonflable. Cette petite sortie lui permettra de se rembourrer un peu.
♦ Lancez-vous dans le « convive de location ». Vous trinquerez non seulement à sa santé mais aussi à celle de l’établissement (qui fera son beurre de ce couvert supplémentaire) et de la nation (dont le taux de chômage reculera de manière spectaculaire).
♦ Mangez comme quatre et le problème est résolu.
Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.