Talkie-walkie

 

Son nom rappelle celui d’un jouet. Et pour cause. Car à quoi sert un talkie-walkie sinon à « parler en marchant » ?

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Deux verbes anglais quasi-homophones, un diminutif là-dessus et vous pouvez commencer à faire le cake. Le son est si fort et nasillard qu’au XXIe siècle, on s’étonne que cet engin ait encore du succès auprès des militaires et des armoires à glace. Son côté rudimentaire sans doute.

Et ne vous avisez pas, en plus, de le prononcer « tolkie-wolkie » comme certains dicos l’autorisent dans un accès de clémence. Les l sont là pour faire traîner la voyelle qui les précède. En terre anglaise, vous vous feriez recevoir, et pas 5 sur 5.

 

Il est vrai que talk et walk se côtoient depuis 1200.

Le premier, né talken, provient probablement du tale bien connu (« histoire, conte »), transmis par l’indo-européen del- (« compter, calculer ») qui est aussi le papa de tell. Tel tale, tel tell.

Walk est le rejeton du vieil anglois wealcan, « ballotter, rouler » et de son jumeau wealcian, « enrouler, boucler ». Descendants lointains du wel- indo-européen (« tourner, rouler »), tout comme la « roue » anglaise wheel, celle du vélo « véloce » ou de la Volvo qui « tourne » dans le garage. L’étymo – ce trésor sans fin – évolue toujours dans plusieurs directions.

 

Notez que les Américains, préférant « marcher en parlant », ne jurent que par walkie-talkie depuis 1939. Ça nous fait bizarre dans ce sens-là mais ce sont eux qui l’ont inventé, alors shut up.

Après tout, rien n’empêche de danser le woogie-boogie en boulé-roulé dans un joyeux bohu-tohu.

Merci de votre attention.

 

Tacler

 

Si l’on incline à « tacler »* la corporation journalistique, ce n’est pas qu’elle succombe plus que d’autres à la tentation du jargon : elle le fait publiquement. Ce qui nous donne du biscuit jusqu’à la Saint-Glinglin. Si c’est pas merveilleux.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Car voyez-vous (dirait le grand tacleur Méluche), cet usage médiatique de « tacler » n’aura jamais cours au-delà du mur d’une rédaction. Tout juste le verbe s’applique-t-il au match d’hier de l’équipe du coin commenté au zinc d’en face :

Puuutain, t’as vu comment qu’il l’a taclé !

Il faut déjà faire montre d’aussi peu d’envergure que de scrupules pour pisser du titre comme :

Frédéric Beigbeder tacle Nicolas Bedos

(non, il ne s’agit pas d’homonymes en protège-tibias)

ou

Numéricable à nouveau taclé : Bouygues réclame des dommages et intérêts

(sic, trois fois sic).

Verbe court, consonnes dures promptes à évoquer ce plongeon du diable vauvert pour défendre (une cause, au figuré). Pour un peu, on visualiserait son vol plané, à Numéricable, suivi du roulé-boulé de rigueur avec rictus de souffrance et imploration de maman – jusqu’au moment du carton que choisit le taclé pour s’en retourner gambader.
La métaphore est pratique. Mais d’un lourdos à faire frémir.
Surtout, elle dévie de son sens initial (« couper l’élan ») en niant la dimension défensive du tacle devenu pique, vacherie, coup bas.
Ce qui explique que contrer ou plaquer, pourtant tout aussi dissuasifs, n’aient pas les faveurs des journaleux. Basket ? Rugby ? Sports de lopettes où prévaut encore un certain fair-play : très peu pour les tacleurs fous, allons.

Rappelons qu’on peut très bien, sorti du stade, se faire « épingler » ou « rattraper par la patrouille ».

 

D’ailleurs cette acception de tacler (« attaquer, en venir aux mains » chez les Anglo-Amerloques) est dénoncée là-bas comme « not elegant ». C’est pas moi qui le dis, c’est Noah Webster dans son American Dictionary of the English Language. 1828.
Yes sir, y’a pas de honte à faire marche arrière (qui a dit « rétropédaler » ?).

Merci de votre attention.

 

* « Inclinataclé, inclinataclé » : ça swingue tout seul, aujourd’hui.