La société des cyclones

 

Un beau jour de tempête nous vint l’idée de donner un prénom aux ouragans. Cerise sur le gâteau déjà bien imbibé.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Pour commencer, on ignore qui préside au choix du nom. Les météorologues ? Et où se tient leur conclave ? Aux Stazunis, probablement. D’ailleurs, jamais de Marcel ni d’Ernestine à l’horizon. Irma, José, Katrina… uniquement des noms ne connaissant pas de frontières – comme les déferlantes.

Ce faisant, on occulte le plus important : la nature se venge. Dire Katrina au lieu de « l’ouragan de 2005 », ça le transforme en monstre, étranger à nous, bien identifiable. Et ça évite de remonter à la cause – nous en l’occurrence, qui déréglons le schmilblic.

 

Du grand Manitou aux elfes en passant par Belzébuth, nommer ce qui nous dépasse est vieux comme le monde. Les ouragans ne font pas exception, avec leur brusquerie caractéristique à la limite de l’impolitesse.

 

Mais alors, quid des autres phénomènes naturels ? Pensez pas que les avalanches aimeraient qu’on leur donne du Martha de temps en temps ? Et les tremblements de terre ? A la prochaine secousse, on n’aura qu’à dire que c’est James le coupable.

Avocat du diable : on baptise bien les étoiles. Objection, votre Honneur : c’était bien le moins. Jusqu’à supernova preuve du contraire, elles sont là de toute éternité. Alors que le Andrew, hein, il ne va pas se repointer demain, surtout maintenant que tout est retapé.

Quant à l’anticyclone des Açores, on ne l’appelle pas. Normal : il ne nous a pas attendus pour jouer les garde-côtes.

 

Le pire, c’est que cette parodie d’état civil a des effets pervers. Les statistiques montrent en effet que les cyclones « filles » sont trois fois plus meurtriers. Motif : on les associe à la douceur maternelle. Et, khôn comme on est, on ne se barricade plus vraiment. Imelda face à Sauron : il est vrai que présenté comme ça, on ne donne pas cher de la peau de la donzelle.
Heureusement, Superman est là.

Merci de votre attention.