Il n’est pas rare que le pékin moyen partage son enthousiasme en ces termes :
ça déchire sa race.
A condition de réellement kiffer sa race, sans quoi « ça déchire » suffit amplement.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Deux notions plus absurdes l’une que l’autre, juxtaposées pour défier toute vraisemblance : « déchirer sa race » est un tour de force.
Péter, tout arracher et s’éclater avaient précédé déchirer au rayon forte impression, section déformation.
Mais le verbe était en dessous de la vérité. On lui a donc adjoint le concept de race qui, si l’on ne zigouillait encore en son nom, mériterait de souiller la culotte de son voisin de couleur.
Et là, on parle uniquement d’êtres humains.
Car « déchirer sa race » ne s’emploie que pour des objets ou des œuvres. A quelle race ceux-ci peuvent-ils bien appartenir ?
Foin de dithyrambes, nous revient en mémoire le fielleux
va niquer ta race,
sous-entendu
tous ceux de ta race.
Dans l’expression du jour au contraire, l’objet admiré ne peut « déchirer sa race » que dans sa globalité. Vous pouvez commencer à vous représenter mentalement une « race déchirée ». La journée ne sera pas de trop.
Faut-il y voir une variante de l’omniprésente figure maternelle (« la vie/tête de ma mère ») ?
Moins rugueux que
va niquer ta mère,
« va niquer ta race » diluerait le lien de parenté juste ce qu’il faut. Idem pour
ça déchire sa mère,
qu’hors césarienne on ne recommande pas plus que ça.
Ce désir infantile que tout le monde éprouve la même chose que nous explique nos jugements de valeur excessifs. Ainsi surjoués, ils donneraient plutôt envie d’écarteler le genre humain.
Merci de votre attention.