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Z’aurez reconnu incroyable et compliqué, deux oiseaux auxquels on ne laisse plus aucun répit. Etre exempté de l’un ou de l’autre dans une tirade audiovisuelle, notamment déclamée par une voix off payée avec notre redevance, paraîtrait sinon incroyable, du moins compliqué.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Guettez les bestiaux, z’aurez pas à poireauter longtemps. En particulier sur la TNT à l’heure des émissions de faits divers, giboyeuses à souhait :

Un mois plus tard (pause), les enquêteurs retournent sur les lieux du drame. Et ils vont faire (pause) une incroyable découverte.

Hein ! Voilà qui permet de se ménager un suspense aux petits oignons. Qui retombe comme un soufflé quand la montagne accouche d’une souris (‘aime bien, ces petites images pas piquées des hannetons).

De même, le moindre rebondissement sera incroyable ou ne sera pas. Remettez-vous, bonnes gens, ça n’est qu’un rebondissement. Pourquoi ne pas claironner imprévu plutôt ? Parce que c’est s’exposer au pléonasme. Tandis que nincroyable hein, les grammairiens trouveront rien à redire.

Mais qui oblige les gars dans leur cabine à survendre le bout de gras de la sorte ? Déformation professionnelle ? Allons donc. Voulez qu’on fasse le compte de nos propres réflexes de moutons débutants chopés à notre lainage défendant ? Balancer de l’« énorme » à tout-va ? « Trop délirer » à longueur de temps et autres hyperboles nunuches ?

(Pour appuyer le propos, une chronique toute fraîche du sieur Vinvin).

 

Incroyable est costaud, il en a vu d’autres ; gardons nos forces pour compliqué, dont le cas est plus singulier.

Epreuve sportive :

Ah ça devient compliqué pour le Français, là…

(ça l’est depuis le début, au vrai, mais chut ! pas de chauvinisme à l’envers).

Edito politique :

Semaine compliquée pour le Président de la République…

(ça l’est depuis le début, au vrai, mais chut ! pas de poujadisme à mots couverts).

Le pauvre se vide de sa substance à toute berzingue puisqu’on ne détaille guère en quoi la situation est « compliquée » : sa seule présence dans la phrase dissuade de se triturer les méninges. Pas par hasard si compliquer est l’exact inverse d’expliquer, amis étymologues.

Pire encore, non content d’avoir ratatiné ses équivalents dur et difficile [à comprendre], compliqué jette désormais son dévolu sur n’importe quelle épithète pourvu qu’elle soit chargée négativement.
On a ainsi pu entendre évoquée sur un plateau

une ambiance compliquée

au sein d’un groupe de pedzouilles non identifié.
C’est à n’en point croire ses oreilles ; aussi, feignons de n’avoir rien en-tendu.

Merci de votre attention.

 

Coureurs et coureurs

 

Par égard pour le Tour de France qu’on n’arrivera jamais à détester malgré les pharmacopées qui en font et défont la légende, réglons leur compte si vous le voulez bien aux ceusses qui courent à côté des coureurs. Dans le monde du vélo, voilà au moins du sans-gêne incarné au grand jour. Raison de plus pour le pulvériser une fois pour toutes.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Ces khônnards méritent-ils de vivre ? Je ne crois pas.

Signes caractéristiques :

  • invisibles dans la plaine, ne surgissent qu’à la première étape de montagne. Sans doute la raréfaction de l’oxygène a-t-elle raison des derniers neurones en activité ;
  • souvent détenteurs d’une banderole ou d’un fanion de leur cru, qu’ils ne manquent pas de faire flotter au vent comme si leur vie en dépendait ;
  • toujours torse nu, quand ce n’est pas les parties à l’air. Ce qui n’empêche pas – grande nouveauté – les déguisements. « J’ai montré mon cul et tout le monde m’a vu. Mais personne m’a reconnu, j’avais un masque ». Sur leur lit de mort, qui leur enviera cette ultime fierté ?

Détail troublant : cette année, la khônnardise semble toucher des nanas du sexe féminin et même des mômes.
Il est plus que temps d’agir.
Surtout que le khônnard n’est passible d’aucune sanction ! Tout juste une circulaire interministérielle égrène-t-elle ses placides consignes :

Ne courez pas à côté des coureurs. Pour leur sécurité, n’allez pas au devant d’eux, même pour les encourager.
N’aspergez pas les coureurs.
N’agitez pas de banderoles au-dessus des coureurs.

Pondeurs de textes, mégoter de la sorte restera sans effet, je le crains. Puisqu’il n’y a aucun moyen de faire entendre raison au khônnard, et vu la molle indignation des commentateurs de l’épreuve, l’éradication pure et simple s’impose.

 

Ci-après quelques suggestions en ce sens, immédiatement applicables (toute piste sera la bienvenue) :

  • Avec la complicité des ponts et chaussées, provoquer la fonte instantanée du goudron juste sous les semelles khônnardes ;
  • Prévoir un énorme crochet comme au théâtre, qui viendrait de l’arrière faucher le khônnard au démarrage ;
  • Même méthode avec une méduse géante dressée, nourrie exclusivement au khônnard ;
  • Equiper de flash-balls les motards de France Télévisions, les inciter à tirer à vue. Perfectionner l’arme avec un viseur afin d’épargner à coup sûr cyclistes et autres spectateurs.
  • Canarder depuis l’hélicoptère (trop dangereux).
  • Et puisque c’est la promesse d’être vu à la télé qui le fait courir, flouter le visage du khônnard. Avec notre merveilleuse technologie, me dites pas que c’est pas faisable en direct ça, allo, Cognacq-Jay ?

Mais l’objectif ne sera pas atteint sans l’aide de tous.
Je compte donc sur la contribution de chaque acteur du Grand Soir sur la Grande Boucle.

  • Les spectateurs du Tour eux-mêmes, premières victimes des khônnards dont la foulée leur cache les coureurs. Jamais un croche-patte ? Jamais de ceinturage à plusieurs, façon rugby ? Asseyez-vous sur votre éducation, pour une fois. L’anonymat de la foule vous mettrait à l’abri de toutes représailles, pensez-y !
  • Les directeurs sportifs. Khônnards au milieu de la route ? Mais roulez-leur sur les arpions, qu’est-ce qui vous retient au juste ?
  • Quant à vous qui pédalez, l’effort rend évidemment malcommode toute rebuffade. Mais vous êtes aux premières loges, considérez-le comme une chance ! Regard noir. Ecart obligeant à s’empaler dans les gens. Ramponneau. Gourde en pleine gueule. Tout véhément qu’il soit, le khônnard ne vous encourage en aucune manière. Vu son attitude, il n’est probablement jamais monté sur un vélo. Alors un bon geste, pour le bien de tous, n’attendez pas le sommet du col pour lui faire bouffer sa banderole.

Merci de votre attention.