Comment rentabiliser vos employés à 100 % ?

 

La raison fondamentale qui vous pousse de bon matin à nouer votre cravate n’est-elle point de faire du pognon ? Ta-ta-ta, ne vous étranglez pas, patrons (la cravate s’en charge), ne jouez pas les vierges effarouchées, épargnez-nous le couplet sur l’« esprit d’entreprise » ou le « bien-être » de vos employés, de grâce.
Quant à cette histoire de concurrence que vous auriez à « subir », étymologiquement, vous y courez tout seul. Au nom du khâpitalisme, ce concours mondial de quéquettes en avant dans lequel vous jetez toutes vos forces.

 

Il est vrai que vous n’êtes pas soutenu. L’homme politique actuellement au gouvernail décline dans toutes les langues son « amour » pour l’entreprise. Sur un plateau de télévision, un de ses opposants (sic) balance le code du travail comme s’il lui brûlait les doigts sans que personne ne moufte.
Pas question d’embaucher pis quoi encore ? Soyez inflexible : exigez de la flexibilité.

Loin de tout « dogme » et autres mots à fiche les jetons, quelques conseils frappés au coin du bon sens vous aideront à tirer le meilleur parti de vos subalternes.

 

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en boss civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  Time is money. Si, sur le papier, vos employés n’ont pas volé leur pause déjeuner, ils y mâchent littéralement le travail. La seule vue de cette mastication chronophage vous donne des aigreurs ? Mettez une petite équipe de scientifiques danois sur le coup, qui préconisera pour tout le monde une alimentation exclusivement liquide. Que de précieux quarts d’heure de pauses caca économisés !

 

♦  En inversant la proposition « travailler plus pour gagner plus », n’ont le droit de toucher plus que ceux qui triment davantage, CQFD. Tout compétents qu’ils sont, les réfractaires aux heures sup pourront toujours venir pleurnicher sur cet avancement ou cette augmentation que vous ne leur accordez jamais. Comme si la seule motivation dans la vie était le pognon, allons allons, tsk tsk.

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♦  Pour sauver la patrie, rien de tel que le non-remplacement de ses serviteurs partant à la retraite. Bon sang mais c’est bien sûr ! Dans le privé, vous ragez de n’avoir pas eu vous-même cette idée lumineuse. Divisez par deux les charges qui pèsent sur votre budget : virez la moitié de l’effectif. La boutique tournera comme elle n’a jamais tourné.

 

♦  A la guerre comme à la guerre, appliquez la devise « Arbeit macht frei » qui a fait ses preuves question rendement. Pas d’horaires, pas de salaire, droit de grève et autres acquis sociaux réduits au strict minimum ! Seule contrainte : la surveillance, que vous renforcerez en briefant les sous-chefs.

 

Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.

 

Manuel de suffixes

 

Vallsisme. Ça n’a pas loupé, on a osé faire le coup à certain ministre de l’Intérieur (comme à son prédécesseur en son temps). L’intéressé s’en est amusé en rétorquant pile ce qu’il fallait à la face du monde et des journaleux :

Tant que ce n’est pas les « vallseurs » ou les « vallseuses »…

Mais revenons à nos moutons, moutons.

A la minute même où un homme politique vole un peu de lumière aux autres, il est de bon ton (à défaut de goût) d’adjoindre –isme à son blase. Au motif qu’il ferait école ? Peuchère.

Ç’a pu coller en parlant d’une doctrine, qu’elle soit philosophique ou politique (socratisme, gaullisme). Ou d’un régime, généralement peu recommandable (pétainisme). Aujourd’hui, ce suffixe réflexe est tout juste une manière d’acter une manière de mousser un trait de caractère de l’homme de pouvoir. Tout à la joie d’inventer un mot, les interviouveurs le lui balancent aussitôt. Pas uniquement pour guetter sa réaction. Comme vallsisme n’a aucun sens, on somme Valls de lui en trouver un. Seul refuge : la pirouette.

 

Sans compter que la fin des zidéologies voue le procédé à une ringardise certaine.
Trouvez-m’en une née dans le dernier demi-siècle et y ayant prospéré.
‘Tention, concentration…
Bredouilles, hein ? Les médias ayant horreur du vide, ils se rabattent donc sur des gars, dont ils légitiment l’omniprésence (qu’ils ont eux-mêmes façonnée) mais dont on serait bien en peine de résumer la pensée profonde.

 

Essayez avec votre patronyme, pour voir. Ou celui d’un collègue, le petit teigneux, tiens, celui qui tire toujours la couverture à lui ; vous m’en direz des nouvelles.

Et si les professionnels de la profession se mettaient de temps en temps avec nous de l’autre côté de la lucarne ?
La peste soit du suivisme journalistique.

Merci de votre attention.

 

« Le petit caïdat »

 

Ouï il y a peu sur les ondes, à propos d’un raid dans l’un ou l’autre quartier d’une quelconque 3e ville de France :

Justice et police ont lancé une cellule de lutte contre le petit caïdat.

Lapsus auditif ? Le replay confirme que non. La radio, au-dessus de tout soupçon, escomptait sans doute nous faire doucement marrer en relayant tel quel le jargon des zautorités compétentes. C’est donc une plaisanterie.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Le mot a l’air de couler de source. Policière, ça va de soi. Or on ne le rappelle jamais assez, tout citoyen a le droit d’être protégé des fripouilles autant que du mauvais goût linguistique.

Brainstorming place Beauvau. Vous y êtes ? Jusque-là, question trafics en tous genres, les pontes galonnés utilisaient l’expression « zones de non-droit ». La décrétant peut-être trop ringarde ou politiquement correcte, les voilà planchant sur une nouvelle tournure qui « parle » immédiatement tout en exhalant l’institution. Ça fume, ça fume, quand soudain, l’étincelle : caïd → caïdat ! Et vlan, voilà « le petit caïdat » porté sur les fonts baptismaux. « Petit » pour éviter la confusion avec les « gros » bonnets ? Non, messeigneurs : pour mieux masquer la gémellité phonétique entre « lutte contre le caïdat » (sans précision de taille) et « lutte contre Al-Qaida ». L’épithète nous préserve du tollé ! Mais pas du ridicule puisqu’ainsi rapetissé, caïdat fait davantage youkaïdi qu’Axe du mal.

Dans un français impropre à la consommation de surcroît. Sous prétexte qu’adjectif et nom vont de pair, les huiles susdites ont cru pouvoir former « petit caïdat » sur « petit caïd » sans que personne ne bronche. Or, ça n’est pas le caïdat qui est petit, au contraire. Faudrait, en toute logique, écrire « petit-caïdat ». Mettons qu’il existe ici-bas une société dominée par les mémés : causerait-on de « grand matriarcat » ? A le lire comme ça, on songe plutôt à un potentat de momans.

 

Double raison d’exécrer les petits caïds. On rêve du jour où l’Intérieur déclarera solennellement sur le théâtre des opérations :

Le petit caïdat est mort.

Merci de votre attention.