La phrase vint de la cuisine (ou le mot vint de la kitchenette, selon votre ordre de grandeur) :
T’as filmé les verrines ?
Une lame de dépit submergea votre serviteur à l’idée de devoir changer de famille. Il ne serait pas dit qu’une vidéo amateur à visée culinaire pèse sur sa conscience.
C’est alors que ouf, une lueur d’intelligence reperla.
Mais revenons à nos moutons, moutons.
Ce filmer inouï se rapportait en fait au film alimentaire censé couvrir la brave boustifaille, non à un caméscope ou quelque descendant numérique apte à immortaliser l’exploit.
Dans notre série « ménage à trois » (un mot, deux choses), reconnaissez que film crève l’écran.
Le dico dit en substance, pour la partie cinéma :
Bande pelliculaire photographique de celluloïd ou de nitrocellulose.
D’où, par métonymie, l’œuvre qui y est fixée.
Plus hermétique :
Mince pellicule d’une matière recouvrant une surface.
Fort bien mais s’agit pas de se laisser distraire par la silhouette de film (unique en son genre je vous l’accorde) : quelle pellicule doit son nom à l’autre ?
Si les définitions précédentes ont cours depuis 1932, les photographes utilisent dès 1845 cette « bande de pellicule » qui devient « instantanée » en 1889 avant de radiner sa bobine dans les salles obscures un septennat plus tard.
Le répétez pas mais en VO, film, c’est de l’angliche.
Et du vieux, même. Filmen (« membrane, peau, pellicule ») provient de l’encore plus lointain germain filminjan, extension de l’encore encore plus lointain germain fello(m) (« peau d’animal »), issu du carrément hors d’âge pel- indo-européen (« peau »).
Souvenons-nous en effet du grec pella, du latin pellis, de nos pelisse, pelure sans parler de pellicule qui n’est qu’une « petite peau » c’est vrai ça…
Et si on arrêtait de s’extasier devant les acteurs qui entrent dans la peau de leur personnage ? C’est le film qui veut ça.
The end.
Merci de votre attention.