Cambriolage

 

Y aurait-il des gentlemen-cambrioleurs ? C’est ce que la littérature tente de nous faire croire à coups d’Arsène Lupin, Rocambole et autres monte-en-l’air au nom trop beau pour être honnête. La littérature ne s’est jamais fait cambrioler.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Rappelons en quoi consiste le forfait :

commettre un vol en pénétrant dans un local par effraction.

Soit vous vider de l’intérieur dès que vous avez le dos tourné. Autant vous empailler vivant. Il n’y a pas plus lâche au monde qu’un cambrioleur. Impossible donc de lui reconnaître un quelconque panache ; tout juste de l’agilité, eu égard aux dimensions du vasistas et à l’influence plus ou moins sournoise de cabriole.

 

Le premier qu’on surprenne à cambrioler, c’est Rabelais (sans blague ? mais comment disait-on avant lui ?). Fin XIXe, le verbe prend officiellement le sens de « dévaliser », en particulier une « chambre ». Cherchez pas plus loin : cambriole = chambre en argot. En occitan, on dit encore cambra ou chambra selon la rive du Rhône. Un vieux reste du XIe siècle, où cambre et cambra reprennent les plans de la camera latine. On sait comment les premiers photographes utilisèrent la camera obscura (« chambre noire ») avant d’enregistrer le mouvement.

 

Sauf qu’au départ, crécher dans une camera, c’est dormir sous les toits. En cause la « voûte » grecque kamara, formée sur l’indo-européen kam-, « courbé ». Résultat des courses : kampê (« courbure, tournant »), kámptein (« tourner, courber »). L’hippocampe, qui est cambré comme pas deux, en sait quelque chose. Quant aux Romains « cherchant un moyen de s’échapper », ils devaient « campas dicere » comme nous autres au moment de prendre la « poudre d’escampette ».

 

Résumons : le cambriolage ne concerne que la chambre. Si les autres pièces sont à sac, n’hésitez pas à faire jouer les assurances. En leur rappelant qu’installer des caméras pour déjouer les cambrioleurs est un procédé tout ce qu’il y a de plus loyal.

Merci de votre attention.

Comment sauver votre stylo fétiche du kidnapping ?

 

La tchatche s’envole, les écrits restent : votre fidèle stylo est le plus court chemin entre votre âme et la postérité. Neuf chances sur dix pour que pendant votre absence, on viole votre papeterie intime. Et à votre retour, c’est le vide que happe votre main au moment de vouloir s’en saisir. Malgré une enquête de voisinage menée tambour battant et le couteau entre les dents, personne n’a rien vu, rien entendu. Tous complices, c’est pas possible.

Aucune explication rationnelle : la malédiction du stylo qu’est pus là a encore frappé.

 

Une fois calmées vos velléités vengeresses, reste à savoir ce qui peut bien traverser le crâne du kleptomane qui, dix fois dans les parages, vous dépossèdera dix fois. Tôt ou tard, celui-ci a la claire conscience d’avoir commis l’irréparable ; que ne vous le rend-il dans un torrent d’excuses ?

Soit ce type de zigs croit que ce qu’il empoigne est à lui et l’embarque sans demander la permission ni son reste. Soit il jalouse votre style. Qu’espère-t-il donc en s’emparant du pinceau de Picasso ? Le mystère demeure.

 

Or donc, quelle attitude adopter ?
Réagissez en dépouillé civilisé.
Plusieurs options s’offrent à vous :

 

♦  Mordillez constamment le bout, à l’ancienne. Vous aurez la langue d’un schtroumpf mais plus personne n’y posera ses sales pattes.

 

♦  Vous rabattre sur un stylo de seconde zone ? Seconde victoire pour le voleur ! Tapez plutôt au clavier, jusqu’aux plus minimes griffonnages. La manip nécessite d’imprimer pour un oui pour un non ? Ce que la planète y perdra, votre orgueil y gagnera.

 

♦  A l’instar des valises de la Brink’s maculant les biftons lorsqu’un braqueur actionne le système, piégez votre stylo pour que toute l’encre éclabousse à la gueule du pickpocket.

 

♦  Puisque vous vous taillez les veines à chaque disparition, n’écrivez plus qu’avec le sang qui en pisse. Au moins, on ne viendra pas vous le piquer (sauf vampires de passage).

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Flegme et dignité, montrez de quel bois vous vous chauffez.

 

Stations en bataille

 

Laisser un endroit dans l’état dans lequel on le trouve ; de par leur sacerdoce, voilà bien un principe qui ne s’applique pas aux garagistes (bien que le plus souvent, tout indique qu’ils n’ont touché à rien). C’est même incompatible avec le décrassage du transmuteur à cause de la valvinette du vilebrequin et des clapettes parallèles qui jouaient sur le sous-ignifugeur principal et c’est pour ça que les pas de vis de la calissandre étaient foutus.

Mais revenons à nos moutons, moutons.

Forte de cet avantage sur nous autres mortels, l’engeance à mains noires pousse le bouchon de radiateur jusqu’à tripoter votre autoradio. Au sortir d’une réparation vous laissant déjà l’impression de vous être fait emboutir l’arrière, des hertz inconnus s’affichent au tableau de bord et retentissent dans vos baffles. Et tous vos rogntûdjûs n’y changeront rien.
Exactement comme si vous récupériez votre ordinateur guéri d’on ne sait quelle vérole par le technicien qui en aurait profité pour installer un nouveau fond d’écran plus à son goût.

Hein que c’est énervant.

Quelque amour qu’ils vouent au cambouis, les mécanos font un boulot pénible. A l’atelier plus qu’ailleurs, bosser en musique est donc légitime. Que ne dérèglent-ils leur propre transistor ?
Au motif qu’ils opèrent à cœur ouvert une titine qui n’est pas la leur, devraient-ils en disposer comme bon leur semble ? Et sans recoudre ?

Un viol supplémentaire, voilà, automobilistes, ce qu’on vous inflige après la douloureuse.

 

Pour que votre intimité ne soit plus jamais souillée, un bon geste : achetez un vélo.

Merci de votre attention.